Parmi les personnages qui font partie de la coterie entourant Hassan Nasrallah, nul n’a mieux réussi comme Naïm Kassem à incarner avec autant de perfection la fatuité voluptueuse et l’insolence méprisante caractéristiques des apparatchiks. Le numéro deux du Hezbollah ne s’encombre jamais de fioritures de style pour vous asséner ses boniments comme des vérités absolues et définitives.
Avant de succomber aux sirènes envoûtantes d’un au-delà spécialement formaté pour mieux servir les desseins de ses maîtres à Qom, il avait suivi des études de chimie. C’est probablement pour cette raison qu’il est passé maître dans l’art des amalgames. Avec lui, le mensonge le plus grossier peut se transformer en pure vérité.
Sûr de son fait, comme peuvent l’être tous les charlatans, il est capable sans ciller de vous annoncer que la terre est plate ou que soleil est carré tout simplement par ce que Téhéran ou Damas en ont décidé ainsi ou bien par ce que le cours des évènements se trouve être parfois en totale contradiction avec les intérêts du Hezbollah.
Il est révolu le temps où nous devions subir presque quotidiennement ses sornettes sur le « véritable » sens du martyre. Privés de leur terrain de jeu favori dans le sud du pays et faute de territoire à libérer, les militants du Hezbollah ne trouvent plus la moindre petite « opération » qui leur permette de rallonger indéfiniment leur martyrologe. Pour tuer le temps, ils s’appliquent méticuleusement à « libérer » le centre ville de ses occupants et à aménager leur camping pour une occupation qu’ils espèrent durable.
De la même manière Cheikh Naïm se trouve obligé temporairement de reléguer ses discours d’endoctrinement au second plan pour mieux s’attaquer à une réinterprétation des textes de la constitution perpétuant ainsi l’œuvre de sape systématique des règles les plus élémentaires de la démocratie parlementaire.
L’enturbanné omniscient est, comme vous le voyez, capable de se métamorphoser en un clin d’œil d’apparatchik en jurisconsulte après avoir longtemps été le vulgarisateur par excellence de la Wilayat El Faqih qui permet à ses mentors iraniens de décider à leur guise de la guerre et de la paix au Liban.
Aujourd’hui, il ajoute une nouvelle corde à son arc en s’investissant dans le rôle de Grand Inquisiteur digne des temps médiévaux. Il met en garde la majorité parlementaire d’élire un Président de la République qui n’aurait pas préalablement reçu l’aval du Hezbollah.
« Si vous procédez à cette élection sans avoir recours à la majorité des deux tiers, nous ne reconnaîtrons pas le Président élu qui sera le vôtre et non celui de tout le pays. Nous le ferons comparaître devant le tribunal pour le juger comme usurpateur de pouvoir et comme traître à la constitution », dit-il.
Thomas de Torquemada, inspirateur et grand chef de l’inquisition espagnole, semait la terreur dans les villes et les campagnes de l’Espagne. Il avait un talent inouï pour persuader ses auditeurs qu’il était le véritable exécutant de la justice divine. Il pouvait tout et prévoyait tout sauf qu’il aura, à quelques siècles de distance, un rejeton digne de perpétuer ses méfaits en terre d’Islam.