Le débat sur les armes du Hezbollah est mal mené, bien qu’il ait le mérited’exister. Nous savons tous d’où provient cet armement, depuis quand, pourquoi, etc. Cela ne sert absolument à rien de tergiverser en interne, qu’on soit pour ou contre, ça ne fait que renforcer le Parti de Dieu dans sa situation actuelle qui est de se positionner au-dessus des lois et de l’Etat. C’est l’Etat libanais, son président en tête, qui devrait négocier avec les fournisseurs en armes du Hezbollah, avec Israël et avec les
nations qui n’ont comme seul objectif international que la protection de l’Etat d’Israël.
Le débat est mal mené (ou malmené) parce que les armes du Hezbollah ne servent pas à défendre le Liban. Ils servent à défendre le Hezbollah. En juillet 2006, Israël n’a pas mené une guerre contre l’Etat libanais, mais contre le sous-Etat Hezbollah. La force de manipulation et d’endoctrinement du Hezbollah est telle que la propagande de « victoire divine » s’est répandue dans le monde entier en se basant sur l’incapacité de Tsahal à venir à bout de « l’armée de la Résistance » et sur les dégâts considérables
occasionnés sur le territoire libanais. Nous savons que si Israël se mettait en tête d’envahir le Liban, ce ne serait qu’une question de quelques jours, voire peut-être de quelques heures. Tous ces dommages humains et matériels subis par le Liban et ses infrastructures durant l’été
2006 sont certes hautement condamnables dans leur sauvagerie et leur barbarie. Mais dans la logique de guerre et de stratégie militaire, c’était d’une part pour essayer d’isoler l’ennemi, d’autre part pour faire pression
sur le gouvernement libanais qui est logiquement responsable de tout ce qui se passe sur son sol, en l’occurrence là du Hezbollah qui en a profité pour
asseoir confortablement le principe que son mouvement armé est non seulement supérieur aux moyens de l’Etat libanais, mais qu’il est indispensable.
Tant que le Hezbollah continuera de recevoir quotidiennement des armes au nez et à la barbe des contrôles ficitifs soi-disant mis en place par les
instances nationales et internationales diverses et variées, il se confortera sans limite dans le rôle qu’il s’est octroyé. La puissance d’un Etat se mesure par sa force de dissuasion, c’est-à-dire ses moyens de défense et son armée. Pour se donner ces moyens, le Liban doit se doter d’une vraie armée et de moyens militaires qu’elle est encore loin de posséder. C’est un projet laborieux. Depuis son indépendance, le Liban n’a jamais pu prétendre à un Etat de droit. Sans Etat de droit, un pays ne peut
se targuer de posséder une armée digne de ce nom, et à terme, toutes les dérives sont permises. Preuve en est ce que les Libanais endurent depuis 1975. Cette (ou ce semblant d’) armée a implosé au début de la guerre et
n’a jamais pu se refaire une santé, même précaire, pour les raisons que l’on sait : conflits internes inter-communautaires, tutelle syrienne empêchant toute initiative libano-libanaise, avènement du Hezbollah, etc.
La gouvernance libanaise était bâillonnée.
En outre, le débat sur les armes du Hezbollah dérange. Parce que ceux qui mènent ce débat ne balaient pas toujours devant leur porte. C’est un débat sur l’ensemble des armes au Liban qu’il faut mener. Le jour où (il n’est
pas interdit de rêver) le président de la République ordonnera fermement que toutes les armes au Liban, qu’elles appartiennent à un parti ou à un ministre ou à un particulier, soient remises à l’armée libanaise, ce sera
un grand pas vers la fin de la guerre civile. Puis (pour rêver un peu plus), quelques générations plus tard, il y aura peut-être un président qui agira pour mettre fin au système politique confessionnel du Liban.
rmalek@noos.fr