Le 16 novembre, le site d’information en ligne All4Syria a publié coup sur coup deux informations qui devraient retenir l’attention des inspecteurs de l’Organisation pour l’Interdiction des Armes chimiques (OIAC), attelés depuis le 1er octobre 2013, au démantèlement de l’arsenal utilisé le 21 août précédent par le régime contre des quartiers de la Ghouta, à l’est de la capitale. En dépit des dénégations des Russes prêts à tout pour défendre leur protégé, et malgré le soutien apporté à son cousin par Ribal al-Assad, fils de Rifaat al-Assad, il est établi que les forces régulières avaient auparavant utilisé de telles armes à plusieurs reprises.
All4Syria affirmait d’abord avoir été « averti par des activistes que, depuis la nuit du mercredi 13 au jeudi 14 novembre, des hélicoptères transportent vers une destination ignorée des barils de produits inconnus, en provenance des dépôts d’armes et de munitions de Qara, dans le Qalamoun ». « Ce renseignement était d’autant plus important », selon les mêmes activistes, « que ces transports intervenaient avant une visite attendue aux entrepôts de la région de l’équipe internationale chargée de la destruction de l’arsenal chimique du régime ».
Le site mentionnait deux autres développements qui pouvaient être liés à cette affaire :
– le bombardement de la ville même de Qara, située sur les pentes du Qalamoun, à l’ouest de l’autoroute reliant Damas à Alep, auquel participaient des hélicoptères et des chars. Débuté mercredi 13 novembre, ce bombardement pouvait aussi bien constituer une diversion que précéder une tentative de reprise de la ville. Il signifierait alors le début de la « bataille du Qalamoun », dont le régime avait beaucoup parlé sans faire grand-chose de concret jusqu’ici ;
– la fermeture, le 16 novembre, de la voie rapide en provenance de Damas, qui pouvait être l’une des conséquences de la bataille entamée.
Quelques heures plus tard, All4Syria affirmait, en se fondant sur « une source au sein de la Garde Républicaine coopérant avec la révolution », que « Bachar al-Assad avait ordonné de dissimuler des matières secrètes, parmi lesquelles des produits destinés à ses armes chimiques, dans l’immense sous-sol du mausolée de son père Hafez al-Assad, dans le village de Qardaha ». Le site ne doutait pas que, en se rendant sur les lieux, l’équipe des inspecteurs de l’OIAC y ferait « de nombreuses découvertes ».
De toutes parts, des avertissements ont été lancés, parfois avant même que les inspections ne débutent, sur les tentatives de dissimulation auxquelles les dirigeants syriens ne manqueraient pas de se livrer. Même confrontés à des situations délicates provoquées par leurs agissements inconsidérés, il n’est pas dans leurs habitudes de répondre à ce qu’on attend d’eux et de mettre en œuvre leurs propres engagements sans tergiverser, procrastiner, manœuvrer et finalement tenter d’abuser la confiance qu’ils exigent que l’on place en eux.
Passé à l’opposition le 12 mars 2013, le général Zaher al-Saket, chef de la branche chimique de la 5ème division, avait ainsi affirmé, le 2 octobre, que « le régime de Bachar al-Assad ne remettra certainement pas l’intégralité de son arsenal chimique, dispersé dans quatre grands emplacements secrets dans différents coins de la Syrie ». Transportée à bord de près d’une vingtaine de camions, une partie de cet arsenal avait déjà gagné les entrepôts du Hezbollah au Liban, via le poste frontière de Jdaïdet Yabous. Une autre avait été dissimulée à proximité de la frontière avec l’Irak. Il a ultérieurement affirmé, le 1er novembre, que des officiers supérieurs de l’armée régulière avaient vendu aux rebelles hawthistes, au Yémen, une tonne de ces produits interdits pour une valeur d’un milliard de dollars. Une autre partie du stock chimique syrien, d’une valeur estimée à 40 milliards de dollars, devait être remise à la Russie pour être recyclée… ou revendue, afin de compenser le prix non acquitté des livraisons d’armes russes à la Syrie. Selon lui, les 10 énormes bateaux récemment arrivés en Syrie n’étaient pas destinés, comme on l’avait dit, à évacuer les ressortissants russes, mais à emporter ces produits prohibés…
Il importe donc plus que jamais, s’agissant du régime syrien, que la communauté internationale dans son ensemble, et non les seuls Américains, fasse montre d’une extrême vigilance. Si, en se rendant sans tarder sur les lieux, les inspecteurs de l’OIAC ne découvrent pas les produits annoncés, il n’auront pas tout perdu : ils auront eu l’occasion d’admirer, pendant qu’elle est encore debout, la dernière demeure du « président à vie », devenu le 10 juin 2000 « dirigeant pour l’éternité ».