Samedi 7 Février 2010, une manifestation contre la violence envers les femmes dans la société arabe a eu lieu à Nazareth, à l’initiative du Comité de la Haute surveillance Arabe. Ce n’est pas tous les jours que les femmes arabes gagnent du renfort venant de tout le spectre de la politique arabe en Israël. L’encre sur les affiches réalisées dans le cortège était à peine sèche, lorsque les rapports publient qu’une autre femme a été tuée.
Certains disent que les « crimes d’honneur de la famille » dans la société arabe sont une autre variante de la violence envers les femmes. Toutefois, il est impossible d’ignorer le fait que tandis que dans d’autres sociétés les meurtriers sont les maris ou même les amants qui commettent les assassinats dans un contexte bêtement appelé « romantique », dans la société arabe ces crimes sont commis par des frères, des pères ainsi que des cousins. Les intellectuels arabes qui se détournent de la responsabilité en égalant les deux phénomènes, tombent dans le piège qui les situent dans un coin sombre : stipulant une équivalence entre les deux phénomènes qui oblige à expliquer ce qui est « romantique » dans l’assassinat d’une femme par son frère, son père ou certains de ses autres parents mâles.
Afin de comprendre l’origine du problème, il suffit de lire un article de Cheikh Kamal Khatib, chef adjoint du Mouvement islamique en Israël, écrit en janvier 2007. Cet article s’inspire de la norme qui prévaut à de nombreux niveaux de la société arabe, dans toutes les communautés (musulmanes, druzes et même chrétiennes à un degré moindre). Khatib s’en prends violemment à la demande de défense des droits de la femme et le compare à des complots colonialistes.
Les remarques de Khatib interviennent en réponse à un article écrit par l’avocate Samar Khamis du centre juridique Adalah pour les droits des minorités en Israël. Elle parle de l’oppression de la femme arabe et donne comme exemple les mariages forcés et la sanctification de la virginité. « L’appel à la révocation du caractère sacré de la virginité », écrit Khatib, « équivaut aux coups de poignards et attaque grossièrement notre religion, notre morale et notre saint des saints nationaux. » Ce qui irrite Khatib plus que tout, c’est l’existence de l’Aswat (voix) de l’Organisation des femmes arabes gay : « Quels services ces femmes apportent-elles en dehors de la corruption, de la destruction et de l’abandon de la moralité, de l’image et de l’identité de notre peuple ? », questionne Khatib dans son article.
La perception que tous les fardeaux de « l’honneur arabe » reposent sur les épaules des femmes tire sa force de la structure tribale, qui est le principal obstacle au développement de la société. Les racines du problème résident, d’une part, en l’absence totale de compréhension de l’essence de la masculinité, et d’autre part, dans le fait que les hommes arabes vivent dans un état d’oppression religieuse, sociale et politique. L’homme arabe abattu a grandi dans une structure tribale oppressive dans laquelle il cherche le maillon le plus faible afin de le battre, de l’étouffer et même de l’assassiner. De cette façon, il soulage sa frustration en déchargeant son « honneur personnel perdu » sur les épaules de la femme.
Le sens profond de cette nouvelle perspective est que c’est l’homme arabe lui-même et personne d’autre qui se prive de son honneur personnel. Comme il est, par ailleurs, privé de son honneur social, culturel et politique, d’une manière détournée et aussi lâche, il trouve un substitut pour démontrer son honneur masculin. Il s’agit d’une façon extrêmement basse de démontrer sa supériorité envers la femme arabe.
Afin d’apporter un changement, il faut une révolution de consciences, dont le but sera de libérer l’homme arabe de l’oppression dans laquelle il est plongé. L’éducation, tant à la maison qu’à l’école, doit transmettre la perception que l’honneur découle de l’individu lui-même. L’honneur personnel de l’individu est exclusivement lié au propre de l’individu et aucune autre personne n’a rien à voir avec cet honneur. C’est cette perception déformée de l’honneur masculin qui détruit la société arabe et ces questions nécessitent une discussion approfondie et courageuse.
J’ai eu l’honneur de compter parmi mes meilleurs amis des lesbiennes arabes. Je peux dire que la contribution que ces femmes apportent à la société est beaucoup plus grande que celle de beaucoup d’hommes arabes, dont l’ensemble de la masculinité se résume à rehausser leur poitrine et faire pousser leur moustache.
http://salmaghari-en.blogspot.com/2010/02/arab-holy-of-holies.html
Traduit par Sérine Akar (serine.akar@gmail.com)
L’honneur sacré des Arabes d’Israël
Votre blog est impressionnant et je vais du coup le relayer à une collègue qui semble être d’accord avec vous et je suis certaine qu’elle m’en sera reconnaissante. Félicitations pour ce post et votre implication pour mettre en commun ces réflexions. Je serais ravie d’avoir la possibilité de lire vos articles à ce sujet prochainement. Ca m’est vraiment très précieux ! Mille mercis