Pas de répit pour les responsables sécuritaires, qui craignent un été particulièrement chaud cette année. L’attentat de Qaa leur donne raison. Les renseignements collectés par les différents services de sécurité confirment d’ailleurs cette hypothèse : le territoire libanais serait la cible d’attaques potentielles cet été, en réponse spécifiquement à l’ingérence du Hezbollah en Syrie, selon un responsable sécuritaire. L’objectif global étant la stabilité du Liban – et son corollaire, la saison estivale. C’est d’ailleurs sur base de ces informations précises qu’une série d’interpellations ont déjà eu lieu, déjouant ainsi plusieurs tentatives d’attaques terroristes que des cellules comptaient mener. Les responsables politiques ont d’ailleurs été tenus au courant de ces renseignements, sans pour autant qu’un climat général de terreur ne soit créé. Le commandant en chef de l’armée, le général Jean Kahwagi, n’hésite pas dans ce cadre à répéter que la situation est sous contrôle, et qu’elle reste bien meilleure que celle des pays voisins, voire d’autres pays étrangers.
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Concernant l’attentat d’hier, un responsable sécuritaire révèle que les kamikazes, qui portaient des ceintures d’explosifs, n’avaient pas de barbe et portaient des vêtements d’été. Ils sont vraisemblablement entrés au Liban via des passages clandestins et visaient des meetings partisans bien déterminés dans la région, incapables d’accéder à d’autres zones plus lointaines. Les jihadistes ont cependant été démasqués avant de pouvoir passer à l’acte. L’un des propriétaires du village, ayant entendu des bruits étranges dans le jardin de sa maison, a demandé à l’un des intrus présents sur les lieux de décliner son identité. L’homme lui a aussitôt répondu qu’il était membre des services de renseignements de l’armée. Peu convaincu, le villageois a réitéré sa question, avant d’ouvrir le feu dans sa direction. Deux des kamikazes se sont aussitôt fait exploser. Les deux autres ont attendu qu’une patrouille arrive sur les lieux pour le faire à leur tour, tuant cinq personnes. Les premiers éléments de l’enquête montreraient que c’est l’armée qui était dans leur ligne de mire.
Le général Kahwagi s’est aussitôt rendu à Qaa pour inspecter la zone de l’attentat. Les notables de la région et les responsables ont de leur côté demandé à ce que la troupe puisse disposer de toute la latitude pour circuler à sa guise dans la région, de manière à ce que la zone soit hautement sécurisée et militarisée, empêchant ainsi des miliciens de se retrouver dans la région limitrophe du village. Ils ont également réclamé le transfert du camp de réfugiés syriens en Syrie même, et le déploiement de l’armée à la frontière pour protéger le village et ses environs, de manière à ce que les points de passage clandestins soient désormais impraticables pour les terroristes.
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Parallèlement, des sources parlementaires et politiques ont mis l’accent sur la nécessité d’éloigner les positions du Hezbollah de la frontière, de sorte que seule l’armée, aidée par les forces de sécurité, assume la défense et la protection du périmètre national. L’État est ainsi appelé à assumer ses responsabilités et à étendre sa souveraineté sur l’ensemble de son territoire, et les combattants du Hezbollah devraient retourner au Liban, sans quoi l’ensemble du Liban risque de se retrouver en danger, affirment des sources politiques proches du 14 Mars. Les renseignements recueillis par les services de sécurité prouveraient en effet qu’aucune région ou communauté ne serait à l’abri d’éventuels attentats.
Hassan Nasrallah pourra-t-il convaincre Téhéran de la nécessité pour le Hezbollah de retourner au bercail, surtout après les lourdes pertes essuyées par le parti à Alep ? Récemment, le secrétaire général du parti chiite aurait interdit aux cadres supérieurs du parti de se joindre aux combats en Syrie. Pourra-t-il prendre la décision courageuse du retour, dans l’intérêt supérieur du Liban, et dans le cadre d’un processus centrifuge qui l’inciterait également à débloquer la présidentielle et à relancer les institutions – sans pour autant obtenir en échange le package deal global auquel il aspire ?