Depuis sa création par l’Iran, le Hezbollah n’a jamais caché sa volonté de mettre la totalité de la communauté chiite libanaise sous sa coupe. Au bout de ce long parcours, il croit y avoir largement réussi. Ce qui entretient cette illusion, c’est sa capacité à mobiliser des centaines de milliers de sympathisants sous n’importe quel motif et c’est aussi, l’acceptation apparente de ces derniers de répondre docilement à l’appel.
Pour atteindre ses objectifs, l’organisation totalitaire du Hezbollah s’est toujours présentée comme l’unique défenseur possible de la communauté face à la barbarie israélienne, mais aussi comme le seul garant de ses intérêts face aux autres communautés. Dans un pays où le plus grand dénominateur commun a toujours été la peur de l’autre, il ne lui était pas difficile de faire accroire aux chiites que leur inféodation totale était leur unique planche de salut.
Pour ceux qui en doutaient, la « victoire » contre Israël en août 2006 est venue apporter la preuve que le Hezbollah était à la hauteur de ses prétentions, ou pour utiliser le slogan maintes fois répété par Hassan Nasrallah, qu’il était capable d’honorer sa « promesse sincère ».
Très peu de chiites se sont exprimés ouvertement au lendemain de la guerre sur la portée réelle d’une « défense » capable d’infliger une « défaite historique » à l’armée la plus puissante du Proche-Orient, mais qui, en même temps, fait totalement fi de la dévastation inévitable de la vie de ceux qu’elle prétend défendre. Le sentiment de fierté et de « dignité retrouvée », une fois l’euphorie passée, ne pèse rien en fin de compte face aux malheurs qui ont frappé les chiites dans leur chair et dans leurs biens.
La peur, cette même peur qui a fait s’accrocher une grande majorité de chiites à leur sauveur « providentiel » est entrain de céder la place aujourd’hui à une immense désillusion annonciatrice d’un désamour, voire d’un début de rejet des vues et des méthodes du Hezbollah.
Depuis qu’il a lancé sa menace de « guerre ouverte » contre Israël, les administrations publiques libanaises se disent submergées par le flot de personnes qui veulent renouveler leur passeport. Angoissés à l’idée de revivre l’enfer du conflit de 2006, les habitants du sud et de l’est du pays ainsi de la banlieue sud de Beyrouth se préparent au pire.
Hassan Nasrallah, qui croyait régner en maître absolu sur les heurs et les malheurs de sa communauté, a déclenché sans probablement le vouloir un vent de panique qui pourrait se transformer, le jour venu, en un sauve-qui-peut général de ces mêmes chiites qu’il prétendait avoir mobilisé pour servir de chair à canon à ses folles équipées guerrières.
La fusion totale entre le « parti de Dieu » et « ses » masses, rêve absolu de toute organisation totalitaire, commence à se lézarder et le désamour qui commence à se cristalliser, c’est Hassan Nasrallah en personne qui en est l’instigateur. C’est bien là, la tragique ironie de l’histoire !