Il a beau s’appliquer à dissimuler son désarroi et à se donner une contenance assurée, Saad Hariri n’arrive toujours pas à se défaire de sa mine piteuse et contrite. Depuis son apparition sur la scène politique, il semble résigné à accepter son rôle de doublure pitoyable et de croire que ses sourires béats remplacent avantageusement les répliques qui lui font défaut.
Trois ans après avoir été arraché à son cocon douillet, il continue à faire étalage de sa morne platitude et de nous faire accroire que les célébrations hiératiques du 14 février peuvent pallier l’inexistence d’une politique véritable.
D’aucuns pourraient arguer de son jeune âge, de son arrivée inopinée en politique à la suite d’un drame personnel et national, ou encore de la campagne d’une rare férocité menée par la dictature syrienne pour le terrasser personnellement ainsi que ses alliés. Tout cela est vrai et compréhensible, mais ne suffit pas pour expliquer l’état d’apathie qui lui colle à la peau comme une seconde nature.
Certes, il lui arrive parfois de sortir de son état de torpeur, mais cela coïncide invariablement avec l’approche du 14 février, date « sacrée » entre toutes. Ses neurones commencent tout à coup à fonctionner, sa fébrilité s’accroît d’un seul coup et la communauté, dont il a reçu l’allégeance en héritage, entre en transe et commence à danser avec lui à l’unisson.
Le drame de ce « Cheikh » de pacotille résume et amplifie celui de la coalition dont il est supposé être le porte-flambeau. Une coalition faite de bric et de broc où les véreux côtoient les têtes brûlées et où les opportunistes se mêlent aux nigauds. Une coalition qui se contente depuis trois ans de réciter les louanges au « Grand Martyr » et de lancer des bravades grand-guignolesques.
« Nous ne voulons pas de confrontation, mais si une confrontation nous est imposée, nous ne resterons pas les bras croisés », lançait-il l’autre jour tout ému de sa propre témérité.
« Nous ne nous tairons plus, nous sommes prêts à la confrontation, même armée », s’était écrié, en écho, son partenaire Walid Joumblatt qui s’est empressé de ravaler ses propos avant la tombée de la nuit. Mais, qui s’étonne encore des axels de Walid bey ?
C’était pour vaincre leur peur et intimider l’adversaire, nous dit-on. Oh, les pauvres malheureux ! Les Libanais ne savent toujours pas s’il fallait en rire ou en pleurer.
Avec cette dernière pantalonnade, ce n’est plus d’un drame dont il s’agit, mais d’une véritable tragédie, une tragédie dont les Libanais sont les acteurs, mais aussi les victimes consentantes. Pour résister à une dictature génératrice de chaos et de mort et au totalitarisme rampant d’un parti sectaire, ils n’ont malheureusement d’autre choix que de remettre leur sort entre les mains d’un ramassis d’incapables !