La République islamique accuse l’État hébreu d’avoir provoqué une explosion sur le site nucléaire de Natanz.
Tel-Aviv
Israël et l’Iran se livrent à une cyberguerre dans laquelle tout se déroule dans l’ombre tandis que les succès ne sont jamais revendiqués officiellement. Le dernier épisode en date de cette discrète confrontation pourrait avoir eu lieu vendredi. Une mystérieuse explosion s’est produite à Natanz, à 250 km au sud de Téhéran, dans un site nucléaire ultrasensible.
Les autorités iraniennes ont d’abord expliqué qu’il s’agissait d’une bombe, avant de parler d’une cyberattaque ayant provoqué une déflagration. Plusieurs responsables iraniens ont ensuite évoqué la piste israélienne et agité la menace de représailles si ces accusations étaient prouvées. Du côté israélien, le mutisme habituel est de rigueur. «Je ne réponds pas à ce genre de question», s’est borné à déclarer Benyamin Nétanyahou, le premier ministre, pour qui l’Iran doté de l’arme nucléaire constitue le pire scénario catastrophe.
Plus prolixes, les médias israéliens ont donné quelques détails sur la cible choisie. L’attaque aurait visé un laboratoire où est testée une nouvelle génération de centrifugeuses qui permettent d’accélérer le processus de production de l’uranium enrichi. Ce matériel devait commencer à être activé dans des installations souterraines au cours des prochains mois.
Infrastructures civiles
En 2010, un virus informatique surnommé Stuxnet avait déjà permis de saboter des centaines de centrifugeuses à Natanz. Selon tous les experts, cette infiltration qui avait duré un an sans être repérée, avait été perpétuée par l’unité d’élite 8200 spécialisée dans la cyberguerre, des services de renseignements militaires israéliens, en étroite coopération avec la National Security Agency (NSA) américaine.
Plus récemment, l’épreuve de force sur le «cyberfront» entre les deux pays a connu une dangereuse escalade. En avril, l’Autorité de l’eau israélienne a détecté in extremis une attaque informatique qui aurait permis d’introduire des doses dangereuses de chlore dans le système de distribution d’eau de plusieurs localités. Selon les responsables israéliens, cette agression était d’autant plus intolérable qu’elle visait des infrastructures purement civiles.
La réplique ne s’est pas fait attendre. En mai, le flux des bateaux, des camions et des conteneurs a été paralysé pendant plusieurs jours, provoquant un immense chaos dans un des nouveaux terminaux de Bandar Abbas, le principal port iranien. Petit détail: des militaires israéliens d’une «unité d’élite» ont reçu peu après des félicitations de l’état-major pour le succès d’une opération, dont la nature est restée couverte par la censure.
Toute la question est de savoir, si cette tension pourrait dégénérer. Amos Yadlin, ancien chef des renseignements militaires israéliens, a lancé un appel à la vigilance. «Si Israël est incriminé par les dirigeants iraniens, il faut se préparer de façon opérationnelle à des réactions iraniennes». Selon ce général de réserve, les répliques iraniennes pourraient avoir lieu sur le terrain du cyber, mais aussi sous forme de tirs de roquettes et de missiles de milices chiite alliées de l’Iran à partir de la Syrie vers le territoire israélien, ou encore d’attentats visant des représentations israéliennes à l’étranger.