Sarkozy est un homme pressé. Il court, il court sans jamais regarder en arrière et lorsqu’il trébuche, il se relève immédiatement et sans reprendre son souffle, il se lance à nouveau. S’il s’agitait moins et prenait le temps de la réflexion, Il éviterait peut-être de tomber ou, comme il lui arrive souvent, de mordre la poussière.
L’accord de Doha venait à peine d’être conclu. Une envie irrépressible le saisit. Ce qu’il croyait devoir faire devait être fait tout de suite et ne pouvait donc souffrir aucun délai. Alors, il décroche son téléphone et appelle Assad. Ouf, c’est fait. Quel soulagement ! Depuis la « rupture » officielle de leur dialogue, les termes du troc étaient fixés. Arrêtez l’obstruction et vous serez pardonné.
Nicolas Sarkozy s’est donc empressé de féliciter le tyran syrien pour sa « bonne conduite ». Ce dernier, n’avait-il pas « facilité » la conclusion de l’accord de Doha, alors il méritait remerciements et récompenses. Cela s’appelle le « pragmatisme », qui consiste, dans le vocabulaire du Président français, à se plier en courbettes devant un voyou tout simplement par ce que ledit voyou a décidé de faire une petite pause pour compter ses gains avant de reprendre ses activités délictueuses. La légèreté de l’être Sarkozy est vraiment insoutenable !
La Syrie, l’Iran et leur bras armé libanais venaient juste d’obtenir la capitulation totale de leurs adversaires avec à la clé la neutralisation totale de l’armée (avec le consentement de son chef), la minorité de blocage au gouvernement et une loi électorale taillée sur mesure. Diable, si en contrepartie, ils ne se montraient pas un peu magnanimes envers les vaincus. Si Sarkozy peut se satisfaire de l’os à ronger qu’est l’élection de Michel Sleimane, c’est que sa naïveté a atteint des records effrayants.
D’aucuns pourraient arguer que Sarkozy, tout agité qu’il est, ne pouvait pas être plus libanais que les Libanais. Après tout, ce sont ces mêmes Libanais, ou du moins ceux d’entre eux qui prétendaient représenter le courant indépendantiste, qui ont accepté de signer une reddition sans condition à Doha. Ce n’est que paralogisme, car c’est justement le laxisme de Sarkozy et de ses semblables dans les camps arabe et occidental qui a permis à la milice de Dieu de tenter son coup de force et de le réussir.
La Syrie peut désormais se gausser avec mépris de ses adversaires petits ou grands. La dictature qui se battait, il y a peu, pour sa survie peut maintenant braver le monde et se targuer non sans fierté d’avoir réussi à briser l’étau qui menaçait un moment de l’étouffer. Par la même occasion, la Syrie signifie aux Libanais qui commençaient naïvement à croire à leur indépendance (quelle insolence!) qu’il lui revient à elle, et à elle seule, de décider de la pluie et du beau temps au Liban.
Quant à Sarkozy, il ferait mieux de relire « Le lièvre et la Tortue », il apprendra alors que » Rien ne sert de courir ; il faut partir à point. »