Introduction
1. Un conflit qui dépasse largement son périmètre apparent
2. Un équilibre des forces difficilement inintelligible
3. L’accessibilité des techniques et des moyens technologiques
4. Une part émotionnelle importante dans le conflit
Conclusion : l’erreur fatale des politiques israéliens
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Introduction
Le conflit israélo palestinien qui perdure depuis 60 ans prend une tournure dramatique qui fait douter les plus optimistes sur la possibilité de voir se profiler un jour une solution à ce conflit. L’analyse que nous faisons de ce conflit renfonce encore ce constat pessimiste. Les éléments présentés ci après poussent à dire que la solution à ce conflit n’est pas pour le lendemain. L’incompréhension et les mauvaises lectures dominent la situation. Attendons-nous donc à vivre d’autres épisodes aussi dramatiques.
1. Un conflit qui dépasse largement son périmètre apparent
Le conflit israélo-palestinien, qu’on le veuille ou pas, est l’affaire de l’ensemble de la population arabo-musulmane. La dimension religieuse et la présence de certains lieux saints sur les territoires disputés imposent cette vérité. S’obstiner à ignorer ce fait contribue grandement à alimenter une lecture faussée de la situation et par conséquent à faire éloigner toute issue durable à ce conflit. Il faut se rendre à l’évidence qu’à travers le monde vous trouverez toujours un pourcentage non négligeable de personnes qui se considèrent comme partie très prenante dans ce conflit. Pris sur un milliard et quelques centaines de millions de musulmans cela représente déjà une large population. Si on la rajoute à la majorité de personnes qui se sentent plutôt concernées, cela rend l’équation trop compliquée à résoudre comme on le verra plus loin. Cette masse populaire phénoménale doit être prise en compte. Et vouloir limiter les parties prenantes de ce conflit à Israël et le seul peuple palestinien est tactiquement compréhensible. Cela permet d’affaiblir l’adversaire. Mais ça a pour conséquence de ne faire que retarder la compréhension du problème et encore plus sa résolution. Conséquence, la position de Yasser Arafat sur le partage de Jérusalem et le retour des exilés palestiniens était et restera pour longtemps incompréhensible pour un occidental comme Bill Clinton qui ne peut lire les événements que selon des critères qui lui sont familiers et qu’il considère lui comme rationnels.
2. Un équilibre des forces difficilement inintelligible
Le bilan des forces, avant de parler d’équilibre des forces, reste difficile à établir et demeure indéchiffrable. D’où la difficulté d’esquisser une solution à ce problème. D’un coté l’état d’Israël qui, avec l’appui inconditionnel des USA, possède une puissance militaire et probablement atomique importante. Elle est indiscutablement supérieure à celle de son entourage et tous ses adversaires réunis. De l’autre coté un peuple démuni, qui a « derrière lui » plusieurs centaines de millions de « supporters ».
Dans une situation conflictuelle la solution est en générale déterminée voir imposée par l’équilibre des forces. Ceci est vrai tant que la nature et les éléments constitutifs de ces forces sont les même pour tous les antagonistes. Alors, soit l’équilibre des forces est avéré et les deux parties privilégient une solution négociée et évitent en général le conflit. Soit l’équilibre des forces n’y est pas. Et dans ce cas c’est la partie la plus puissante qui fini par imposer sa solution à l’autre partie. Dans les deux cas le conflit ne dure en général pas longtemps. Le problème se pose lorsqu’un certain équilibre des forces existe mais qu’il fait appel à des éléments constitutifs différents. Dans ce cas la lecture de cet équilibre peut être complètement biaisée. En effet, parler d’équilibre revient à parler d’égalité ou de supériorité. Et il est difficile de comparer des éléments qui ne sont pas de la même nature. Dans notre cas on a d’un coté l’état d’Israël qui représente comme on vient de le dire une puissance militaire imposante, notamment avec le soutient inconditionnel des USA et celui affiché du reste des pays occidentaux. Selon cet élément seul, Israël présente incontestablement la partie la plus puissante et devrait pouvoir imposer ses solutions. D’ailleurs la lecture de la situation selon ce seul critère a depuis plusieurs décennies façonné toutes les solutions proposées et soutenues par les pays occidentaux notamment et même dernièrement par certains pays arabes Mais, Israël demeure un petit pays basé sur un territoire relativement exigu, avec une population trop réduite. Les pays arabo-musulmans quant à eux disposent d’une masse populaire beaucoup plus imposante. Ils disposent de territoires infiniment plus étendus, avec tout ce que cela peut représenter comme conséquences financière, économique…. Selon cet élément les arabo-musulmans sont incontestablement plus puissants. La lecture de la situation selon ce critère et la donnée du §1 plus haut, peuvent expliquer l’embourbement de toutes les tentatives de solution de paix et de politiques de normalisation des relations entre l’état d’Israël et ses voisins. La difficulté dans ce conflit c’est que ce deuxième élément constitutif de la puissance est souvent ignoré non seulement par Israël et ses alliés mais aussi par une bonne partie des gouvernements arabes qu’il soient pour ou contre le processus de paix. Ceci engendre une incompréhension quasi-totale entre les partie alimentée par l’arrogance du coté d’Israël et la frustration du coté de ses opposants arabes. Les effets de ces deux constituants de la puissance sur les évènements sont très différents car les échelles de temps dans lesquelles ils s’inscrivent sont différentes. La puissance militaire a des effets immédiat la puissance démographique et géographique a des effets qui s’inscrivent plus dans le temps et dans l’Histoire. Cet équilibre réel, bien qu’inintelligible, des forces exige une solution équitable aux yeux des majorités des deux parties opposées. Une solution arbitraire, imposé par la force quelle soit militaire ou politique restera bancale et ne survivra jamais à l’hostilité que peut lui afficher plusieurs centaines de millions de personnes de part le monde, même si elle obtient l’aval de quelques gouvernements dit « modérés » qui affichent souvent des positions alignées sur les positions américaines.
Le corollaire de tous cela est que dans tous les conflits arabo-israéliens et notamment lors des différentes guerres la position des pays occidentaux devient plus lisible. En effet Israël s’appui sur sa « supériorité technologique ». On peut dire même qu’elle représente cette supériorité technologique. Cette technologie reste aujourd’hui intimement liée à la civilisation « occidentale » qui s’identifie littéralement à elle. Les occidentaux ne peuvent en aucun cas admettre la défaite d’Israël, car ce serait considéré en partie comme leur défaite, la défaite de la puissance technologique occidentale voire de la civilisation occidentale face à une civilisation considérée comme différente pour ne pas dire opposée.
3. L’accessibilité des techniques et des moyens technologiques
Pour caricaturer on va dire que le problème d’Israël aujourd’hui n’est pas avec le Hamas. Il est surtout avec Al Jazeera. Le monde arabo-musulman accède de plus en plus aux techniques et moyens nouveaux de travail et de communication. Il se dote de technologies et de pratiques évoluées qui peuvent faire en sorte que le conflit prenne d’autres tournures. Les accusations adressé à l’Iran de vouloir se doter de l’arme nucléaire ne représente qu’une facette de cette évolution. A tous les niveaux et dans tous les domaines on observe une prolifération des moyens et techniques notamment militaires dans ces pays. La guerre du Liban en 2006 en est un exemple frappant et Al Jazeera en est un autre. De là à dire que le fossé technologique entre Israël et ses voisins s’amenuise il n’y a qu’un pas. Il faut noter que les stratèges israéliens insistent aujourd’hui sur la nécessité pour Israël de renforcer ce gap technologique. Mais la décision ne leur appartient pas ou plus. Et voir les pays voisins se doter, si ce n’est déjà fait, de moyens militaires significatifs et en tous cas capable de déstabiliser la sécurité de l’état d’Israël est plus que probable. Ceci favorisera l’instabilité et la prolifération et la multiplication des conflits et affaiblira les chances de toute solution négociée dans les conditions actuelles. Le gap technologique et notamment nucléaire avec Israël ne sera pas rattrapé. L’équilibre des forces restera inintelligible et toute solution durable encore lointaine.
4. Une part émotionnelle importante dans le conflit
Il existe dans ce conflit une part émotionnelle voir irrationnelle importante qui reste inaccessible aux occidentaux et à leurs esprits par trop cartésiens et donc à la majeure partie de la gauche israélienne. Ceci fait que toute négociation ou solution basée sur des critères « purement rationnels » sera vouée à l’échec. Les ashkénazes dans leur ensemble, avec leur culture profondément occidentale ne pourront probablement pas trouvez la clef pour réaliser une paix durable. Les faits observés durant ces années de négociations ne doivent pas nous tromper. Les Perez et autre Rabin n’ont jamais été capables de comprendre la situation et de faire avancer le processus sur des bases solides, et ce malgré la bonne volonté affichée. En plus, la position de Perez dans la guerre de Gaza reste aussi choquante qu’incompréhensible et explique à postériori les raisons de l’échec du processus de paix jusqu’alors. Les sépharades avec leur esprit oriental compliqué, subjectif et voir belliqueux seront plus à même de se comprendre avec des interlocuteurs culturellement plus proches d’eux qu’on puisse l’imaginer. Pour exemple rappelons-nous de l’émotion manifestée par B. Netanyahou à la réception d’un bouquet de fleur que lui a envoyé Yasser Arafat à l’occasion de son anniversaire au cours des négociations de paix. Chose que n’aurait jamais pu manifester un Shimon Perez ou une Tzipi Livni ! Certes les problèmes sont plus compliqués que cela. Mais pour pouvoir s’entendre ou même se comprendre faut il que les parties parlent un langage commun ou du moins suffisamment proche. Et les sépharades parlent un langage proche de celui des arabes et en sont culturellement plus voisin. En plus, si les sépharades étaient au pouvoir c’est que les ashkénazes, qui constitue une majorité de la gauche israélienne sont dans l’opposition. Et comme, toutes les gauches occidentales, c’est dans l’opposition que se manifeste le plus leur ancrage à gauche. Elle se transformerait en moteur pour une solution négocié ou lieu de la condamner stupidement comme elle vient de le faire dans la guerre de Gaza. Le problème comme on le sait est que les sépharades n’ont aucune chance de constituer une force gouvernante en Israël. Ils sont souvent relégués au second plan. Et cet éloignement des responsabilités les poussent à adopter des positions radicales, qui rendent toute solution finale au conflit encore plus éloignée.
Conclusion : l’erreur fatale des politiques israéliens
On ne peut qu’être frappé par l’incapacité des leaders israéliens de comprendre la situation et de mener leur peuple sur le chemin d’une paix durable et une vie paisible. Nous savons tous que malgré sa supériorité militaire l’état israélien n’a jamais pu assurer la paix pour sa population. Les israéliens vivent sans cesse dans la peur, aussi relative soit elle. Peur des attaques, peur des attentats… Quel est le gain pour les populations israélienne à vivre dans l’angoisse, d’être haï par leurs voisins et en conséquence à la guerre sur Gaza d’être montré du doigt par l’ensemble des populations mondiales. Du coté du monde arabe on parle souvent du soutien inconditionnel des USA pour Israël qu’on envie presque pour tant d’attention. La réalité est probablement toute autre. Ce sont plus les USA qui profitent d’Israël et font porter le cout de leur politique à son peuple. Les attaques du onze septembre mises à part, le peuple américain vie dans une paix permanente. Ce n’est absolument pas le cas des israéliens. Et la position acquise à ce jour par les USA dans le moyen orient est en partie dû à la présence d’Israël ! La guerre contre Gaza a scellé et pour longtemps le sort de toute tentative d’entente ou même de collaboration avec l’état Israélien. Les leaders israéliens n’ont pas eu la lecture qu’il faut de la situation. Ils ont succombé aux impératifs électoraux et ont par stupidité et arrogance réussit à renforcer la position des pays, des groupes et des mouvements les plus hostile à leur égard au détriment de leurs « partenaires » et autres alliés. Certains pays se trouvent aujourd’hui dans une position intenable. Ils ont sur le dos à la fois le clan des pays opposés aux « processus de paix » mais surtout la majeure partie de leurs populations. A noter à ce propos la position singulière de la Turquie, pays historiquement allié d’Israël. Le gouvernement, poussé par la pression de la rue turque, a adopté une position résolument hostile à la politique Israélienne. C’est sans doute l’une des meilleures réalisations de la politique guerrière israélienne. Ainsi, la manière atroce et haineuse avec laquelle Israël a voulu gagner la guerre de Gaza aura et pour plusieurs génération enterré le processus de paix, du moins aux sens de l’entente. Et bien que l’on peut douter de la sincérité du bonhomme, les propos tenus par le président Syrien B. Assad ont résumé scéniquement le résultat de cette guerre : nous allons garder les images pour les montrer à nos enfants et aux enfants de nos enfants. Et cela veut tout dire ! Cette guerre nous a fait reculer de plusieurs dizaines d’année. Il restera probablement une porte entrouverte pour une paix au sens de la tolérance, de l’acceptation mutuelle. Et même cette paix minimale aura beaucoup de difficulté à immerger de l’océan de sang déversé à Gaza.