Tripoli, Benghazi, MEt
Au moment où l’Iran manifestait par la voix de son ministre des Affaires étrangères son inquiétude devant la situation créée par la chute de Ben Ali, le dirigeant libyen exprimait le 15 janvier sa «profonde tristesse».
Dans un message au « peuple tunisien frère », diffusé par les médias officiels, il a assuré celui-ci de son soutien en souhaitant que les Tunisiens « reviennent à la raison et pansent [leurs]blessures. » Avant de poursuivre par un éloge de Ben Ali « qui devrait rester président non seulement jusqu’en 2014, mais jusqu’à sa mort. » Car « au terme de la Constitution, il reste le dirigeant jusqu’en 2014 ».
Le discours s’achève par une charge violente contre Wikileaks, Facebook et l’Internet, les accusant d’être contraires à la démocratie parce qu’ils ne font que répandre des rumeurs.
Pour beaucoup de Libyens, le message leur est adressé en premier.
Passivité officielle
Le jour même, Oea, le quotidien du fils Kadhafi, Sayf al-Islam, publiait un reportage sur la Tunisie signé Abdel-Daim Maysawi (Oea, 15 janvier 2011). Son titre: « La révolution du jasmin fait tomber le dictateur de Carthage », donnait le ton du reste de l’article plutôt favorable à la révolution.
Sur le mouvement d’occupation des logements en Libye, le même journal se voulait rassurant. Les violences s’étant arrêtées, il faut maintenant restituer leurs biens aux propriétaires légaux.
Trois jours après le déclenchement des occupations d’appartements par une déclaration de Kadhafi lui-même, Oea a enquêté à Tripoli et Benghazi.
Selon le quotidien (16 janvier 2011), un véritable bazar s’est installé à Tripoli pour la vente des appartements occupés la veille. « Spectacle ridiculte, commente le journal, où celui qui ne possède pas vend à celui qui ne mérite pas [qui ne possède pas de droits de propriété]. »
Le droit au logement
La Banque libyenne d’investissement responsable de l’affectation des logements a appelé les citoyens qui sont en possession de certificats d’affectation des logements à se présente à son agence de Ayn Zara. Mais les possesseurs de certificats accusent la banque d’être restée passive jusqu’au quatrième jour des occupations.
Les comités populaires mobilisés, interpellés par les personnes lésées, ont condamné les occupations sans obtenir que les squatters quittent les logements investis illégalement.
A Benghazi, les squatters eux-mêmes ont défendu leur cause devant le comité populaire de Bou Atni samedi matin. Les logements occupés faisant partie d’un complexe appartenant aux forces spéciales, un représentant militaire était présent.
Les squatters ont expliqué qu’ils possédaient des certificats d’attribution de logements mais que ceux-ci leur sont promis depuis des années. Pour le secrétaire des affaires syndicales Nasrallah Saiti, les occupations sont faites par des citoyens qui ont tous les droits à obtenir un logement.
Mais l’agitation est loin de s’être calmée. Il n’est pas sûr que réussisse le pari des autorités de laisser faire en vue de détourner la population de la voie tunisienne en dressant les groupes les uns contre les autres !