La Russie menace de vendre au prix fort la peau trouée de Bachar Al Assad
Avec une lucidité qui aura ravi les Syriens qui tentent depuis 21 mois de renverser le régime en place dans leur pays, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton se sont séparés, jeudi 6 novembre, à Dublin, sur le constat que, en Syrie, « la situation n’est pas bonne »…
A dire vrai, elle est épouvantable. Surtout pour les centaines de milliers de femmes, d’hommes et d’enfants chassés de chez eux par une politique de répression qui se résume en deux mots : destruction méthodique d’un pays que ses actuels responsables savent perdu pour eux, et punition collective des populations considérées à tort ou à raison comme des complices des rebelles et des partisans de la révolution, contraintes à l’exode, soumises au froid, privées de nourriture et de médicaments, etc. Mais il est vraisemblable que, en s’accordant sur la formule, les deux hauts diplomates pensaient moins au peuple syrien qu’au chef de l’Etat syrien.
C’est ce que suggèrent en tout cas les propos tenus une semaine plus tard par le vice-ministre russe des Affaires étrangères Mikhaïl Bogdanov. Montrant de quel côté se situait Moscou, où n’hésitent pourtant pas à se relayer les « opposants »… qui dénoncent jour et nuit le parti pris du Qatar, il a en effet déclaré, le 13 décembre, qu’on « ne peut malheureusement pas exclure la victoire de l’opposition syrienne », puisque, selon lui, le gouvernement de Damas est « en train de perdre de plus en plus de terrain ».
Cet éclair serait encourageant s’il n’était assorti de considérations inquiétantes. Car c’est moins le constat désabusé qu’il faut retenir de sa déclaration, que la mise en garde menaçante proférée au même moment à l’intention de cette même opposition. Alors qu’elle fait un préalable du départ du chef de l’Etat, qui est non seulement illégitime pour ses concitoyens, mais qui s’est discrédité par la sauvagerie avec laquelle il a tenté de s’imposer, depuis près de deux ans, à une population qui ne veut plus de lui, Mikhaïl Bogdanov rappelle que, si les opposants « disent contrôler 60% du territoire syrien », il leur « reste encore 40% » du pays à contrôler ». Autrement dit, « si [vous avez pris]60% en deux ans de guerre civile, il vous faudra encore un an demi [pour vous emparer du reste]. Alors que 40.000 personnes ont été tuées jusqu’ici, la poursuite du conflit va se durcir, et vous allez perdre des dizaines, peut-être des centaines de milliers personnes. Si c’est le prix à payer pour renverser le président et que cela vous va, que pouvons-nous faire ? Nous pensons bien entendu que c’est totalement inacceptable ».
En revanche, le soutien multiforme apporté sans faiblir à Bachar Al Assad, au Conseil de Sécurité et sur le terrain militaire, ne pose apparemment aucun problème aux Russes, qui considèrent qu’il a été aussi légitimement élu que leur propre président… et qu’il n’a pas fait pire que lui en répondant aux provocations de sa population. Campés sur leurs certitudes, ils plaident donc, avec une constance qui fait peu de cas des demandes et des souffrances des Syriens, en faveur d’un « règlement pacifique » du conflit, conforme aux principes de la « transition politique » adoptée, le 30 juin 2012 à Genève, par le Groupe d’Action sur la Syrie.
Le sens de ces propos est clair : la reconnaissance de la faiblesse actuelle du régime en place et la crainte qu’il soit bientôt emporté ne signifient pas que Moscou va interrompre, ni sur le champ, ni à un autre moment, l’aide militaire, technique, sécuritaire, économique et financière que les Russes apportent, sans état d’âme et sans considération pour la population, au régime de Bachar Al Assad. Au contraire, ils feront tout ce qu’ils peuvent pour faire traîner les choses en longueur, continuant de porter le régime à bout de bras, de lui fournir des moyens de répression, de faire la promotion de son image dans les médias et d’entraver l’avancée des révolutionnaires, quitte à allonger la liste des victimes. L’opposition doit donc se rallier le plus vite possible, si elle est aussi soucieuse qu’elle le prétend de la situation des populations déplacées et des autres, à la « solution politique ».
Cela tombe bien : si Bachar Al Assad est prêt à partir, avant d’être chassé ou extirpé d’un égout, la Coalition Nationale est à sa disposition pour discuter avec lui du transfert pacifique du pouvoir au peuple, dans les meilleures conditions possibles. Evidemment, comme son président, Ahmed Moaz Al Khatib, l’a rappelé hier, cela suppose que le chef de l’Etat accepte cette idée. « L’opposition ne prendra aucun engagement formel à cet égard, aussi longtemps qu’une demande formelle de la part de Damas n’aura pas été formulée ».
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La Russie menace de vendre au prix fort la peau trouée de Bachar Al Assad
Bonjour à tous,
Votre blog est fort intéressant, je vais du coup le faire suivre à une copine qui semble être sur la même longueur d’onde que vous et je suis persuadée qu’elle m’en sera reconnaissante. Merci pour ces infos et l’énérgie utilisée pour expliquer ces données. Je serais contente d’avoir la possibilité de vous relire à ce propos prochainement. Encore merci
Marie josèphe