(Le secrétaire général du Parti communiste du Venezuela, Oscar Figuera Gonzalez, démis de ses fonctions, vendredi 11 août 2023.)
Démis par décision de justice au profit d’une direction plus docile à l’égard du gouvernement, Oscar Figuera, le secrétaire général du PCV, dénonce « un assaut du pouvoir ».
Le gouvernement de Nicolas Maduro est « autoritaire et antidémocratique ». Cette fois-ci, ce n’est pas la droite qui le dit mais le Parti communiste du Venezuela (PCV). Longtemps alliés du pouvoir chaviste, les communistes s’en disent aujourd’hui les victimes. Vendredi 11 août, le Tribunal supérieur de justice (TSJ) annonçait la destitution de la direction du PCV, jugée illégitime, et son remplacement par une direction ad hoc, chargée de « rétablir les processus démocratiques au sein du parti ». Pour Oscar Figuera, le secrétaire général du PCV démis, « le parti a été victime d’un assaut du pouvoir ».
Une semaine plus tôt, la Croix-Rouge vénézuélienne avait fait l’objet d’une intervention judiciaire très semblable : les magistrats du TSJ ont limogé Mario Villarroel, qui dirigeait l’organisation humanitaire depuis 1978, et désigné « un conseil de restructuration ».
Ce n’est pas la première fois que la justice vénézuélienne met au pas un parti politique en destituant sa direction au profit d’un groupe de militants plus dociles envers le pouvoir. En 2020, les dirigeants historiques des partis d’opposition Voluntad popular, Primero justicia, Accion Democratica avaient eux aussi perdu le contrôle de leur structure.
Le plus ancien parti du Venezuela
Henry Parra a été nommé à la tête de l’équipe chargée de remettre le PCV sur la bonne voie. Longtemps membre du parti, M. Parra avait rendu sa carte en 2021 pour se rapprocher des dirigeants du Parti socialiste unifié (PSUV). Dans un communiqué publié samedi, la direction sortante du PCV traite M. Parra et ses collaborateurs de « mercenaires » du pouvoir. Paradoxe de la politique vénézuélienne, toute l’opposition, y compris la droite ultralibérale, a manifesté samedi sa solidarité envers le vieux Parti communiste.
Fondé en 1931, le PCV est le plus ancien parti du Venezuela. Allié de la première heure d’Hugo Chavez (1999-2013), les communistes ont progressivement pris leurs distances avec son successeur, critiquant le « virage néolibéral » de la politique économique gouvernementale, la fin du contrôle des changes et des prix, la dollarisation de fait de l’économie ou encore l’ouverture de la région minière de l’Orénoque aux investisseurs étrangers. Les communistes sont devenus de plus en plus critiques de la corruption ambiante et des privations que le pouvoir impose aux travailleurs. D’allié, le PCV est devenu adversaire.
Diosdado Cabello, le puissant vice-président du Parti socialiste unifié, qui anime un programme de télévision hebdomadaire, le rappelait depuis des mois. A l’en croire, la base du Parti communiste n’approuvait pas la ligne critique fixée par la direction. La semaine dernière, juste avant que le TSJ ne rende publique sa décision, M. Diosdado était en visite officielle à La Havane, probablement pour s’assurer le soutien de ses amis cubains.
« Intervention illégale »
Diosdado Cabello est également à l’origine du procès en destitution du directeur de la Croix-Rouge. En juillet, il affirmait, en direct à la télévision, avoir reçu des plaintes d’employés et de volontaires de l’organisation humanitaire se plaignant de harcèlement et de mauvais traitements de la part de M. Villarroel et de son équipe. Sur la base de ces témoignages restés anonymes, le procureur Tarek William Saab a saisi les magistrats du TSJ. « Je rejette catégoriquement l’intervention illégale dont notre institution a été victime, basée sur de fausses accusations », a déclaré M. Villarroel dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux. A la télévision, M. Cabello avait également accusé M. Villarroel de « conspirer » contre le président Nicolas Maduro et de détourner à des fins personnelles une partie des donations faites à l’organisation.
La Fédération internationale de la Croix-Rouge (FICR) a dépêché un émissaire à Caracas, Walter Cotte. Il s’est réuni avec la vice-présidente vénézuélienne, Delcy Rodriguez, et les membres du nouveau conseil de restructuration. La FICR a fait savoir qu’elle entendait « protéger le rôle essentiel de la Croix-Rouge vénézuélienne, de ses volontaires et de son personnel dans le pays », en rappelant que « leur action humanitaire neutre, impartiale et indépendante a été essentielle pour sauver des vies ». Présente dans 191 pays, l’organisation humanitaire internationale ne peut travailler sans l’accord des gouvernements qui l’accueillent.