Les nuances n’échappent pas à l’observation critique de Kafranbul. Pour les Etats-Unis, Da’ech est coupable, mais, s’agissant de Bachar, ses armes seules le sont..
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La porte-parole du Département d’Etat américain a déclaré, mercredi 29 octobre, que les Etats-Unis étaient « horrifiés par les informations selon lesquelles le régime (du président Bachar al-Assad) a lancé des barils d’explosifs sur un camp de déplacés à Idlib et par les images montrant un carnage de civils innocents ». Selon un communiqué du Conseil national syrien, cette opération aurait fait près de 60 morts et de 190 blessés, parmi lesquels, naturellement, une majorité de femmes, d’enfants et de personnes âgées.
Les nuances n’échappent pas à l’observation critique de Kafranbul.
Pour les Etats-Unis, Da’ech est coupable, mais, s’agissant de Bachar, seules ses armes le sont..
Depuis plus de trois ans, les responsables américains n’ont cessé de faire part de leur « horreur » pour les massacres de populations délibérément commis en Syrie par les forces de sécurité et les troupes militaires et para-militaires du régime. Dès le 31 juillet 2011, le chef de l’exécutif américain déclarait être « horrifié par l’usage qu’a fait le gouvernement syrien de la violence et de la brutalité contre son propre peuple. Les informations en provenance de Hama sont épouvantables et montrent le vrai caractère du régime syrien ».
Pour autant, lorsqu’ils ont eu l’opportunité de sanctionner ces actes « horribles », ils se sont toujours abstenus de le faire.
Hier, suite au bombardement de la Ghouta de Damas du 21 août 2013, ils ont considéré, de mèche avec les Russes, que leurs « lignes rouges » n’étaient finalement que des bandes jaunes discontinues autorisant tous les dépassements, et que le criminel pouvait être absout à condition de livrer l’intégralité de ses armes chimiques. Que Bachar al-Assad se soit ensuite abstenu de tenir ses engagements, puisqu’il a récemment été constaté que ses déclarations étaient incomplètes… donc fausses et trompeuses, ne semble les avoir émus que dans la mesure où cet arsenal pouvait tomber entre les mains de groupes terroristes. Étrange logique quand le seul utilisateur avéré de ces armes est le régime syrien, que les Russes auraient défendu avec plus de fermeté s’ils n’avaient pas su avec précision de quoi il retournait !
Aujourd’hui, alors qu’ils ont pris la tête d’une campagne – que d’autres qualifient de croisade… en raison de la discrimination qu’elle opère entre deux parties inégalement criminelles aux yeux des Syriens – contre l’Etat islamique, coupable d’avoir exécuté quatre otages américains et britannique dans des conditions il est vrai particulièrement provocantes, ils continuent de faire part de leur « horreur ». Ils oublient que s’abstenir de porter secours à des personnes, et à plus forte raison à des populations entières en danger, quand on a les moyens de le faire, est assimilable à de la complicité d’assassinat. Et que, laisser les avions et hélicoptères de l’armée syrienne effectuer des raids meurtriers à moins de 200 km de leurs propres appareils revient à les encourager implicitement à poursuivre leurs crimes « horribles ».
C’est du moins ainsi que Bachar al-Assad interprète leur inaction. Elle lui permet de présenter ses opérations contre les populations civiles comme sa « contribution » à la guerre contre le terrorisme et de se prétendre « partenaire » de la coalition internationale engagée dans son pays. En limitant leurs réactions à des déclarations « horrifiées », les Américains et leurs alliés tolèrent ce partenariat et se rendent donc complices de ces crimes.