Diable qu’il est plaisant de suivre les mouvements erratiques du Général ! A peine entame-t-il une « ouverture » vers le camp adverse qu’il se hâte de prendre la direction diamétralement opposée et de défaire avec le même acharnement ce qu’il a mis des semaines entières à construire.
Ses sautes d’humeur et ses diatribes, ses tics nerveux et ses fanfaronnades, son ego hypertrophié et ses petits sourires furtifs concourent pour en faire un personnage riche en couleurs dont on ne se lasse jamais de brosser les facettes.
Quelle mouche a bien pu le piquer pour qu’il en vienne à dilapider l’espace d’une interview les efforts d’ouverture patiemment élaborés en direction de son ennemi préféré ? Et ce visage radieux fièrement arboré au terme de son escapade parisienne, n’était-il qu’amabilité de façade ?
Nul ne peut reprocher au Général de conjurer la malédiction qui pèse sur ses rêves présidentiels, mais il s’y prend comme un manche ! Réalisant enfin l’inanité de son alliance avec le Hezbollah, il a cru pouvoir monnayer sa défection contre un soutien hypothétique de sa candidature par la majorité. La ficelle était un peu grosse.
Hassan Nasrallah avait beau jeu de soutenir « loyalement » le dialogue de son allié avec Hariri, mais pour signifier son mécontentement, il lui suffisait de pousser sur le devant de la scène un Wi’am Wahhab (chien patenté du régime syrien) pour rappeler à l’ordre (avec des menaces à peine voilées) l’imprudent Général.
La queue entre les jambes, Michel Aoun s’est trouvé contraint de refaire son chemin de Canossa, de reprendre sa rhétorique incendiaire et de surenchérir au-delà de toute pudeur. Chassez le naturel, il revient au galop et si le ridicule tue, jamais le Général n’est authentique que lorsqu’il étale sa vanité ridicule.
La névrose narcissique du Général n’a pas de remède. Il ne sera jamais Président, mais ses humeurs pendulaires auront contribué à atrophier encore davantage le rôle-phare que les Chrétiens libanais ont joué pour inoculer la modernité à un Océan arabo-islamique qui ne finit pas de se complaire dans ses archaïsmes.
Le soap-opéra dont il tient le rôle-titre et dont on nous déroule les épisodes depuis des années, tire aujourd’hui à sa fin. En guise de finale, Michel Aoun nous propose un coup d’Etat. C’est dans la logique des choses, car à quoi d’autre peut-on s’attendre d’un Général abandonné par ses alliés et berné par ses amis. Il ne tardera pas à réaliser aussi que ses proches fidèles, même s’ils le souhaitaient, seront incapables de le suivre dans son ultime mascarade.
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