L’ÉCLAIRAGE
Le dossier de la présidentielle est de nouveau sur la sellette, alors même que le Liban peine à former un nouveau gouvernement. Le Parlement élira-t-il un nouveau chef de l’État avant le 25 mai, date à laquelle le mandat du président Michel Sleiman expire, ou bien ce sont les législatives qui seront organisées en premier et c’est une nouvelle Chambre qui élira le locataire de Baabda ?
Curieusement, telles sont les questions qui occupent actuellement les milieux politiques libanais et auxquelles les capitales occidentales commencent également à s’intéresser à l’heure où rien ne va plus dans le pays. Elles se justifient par le fait que d’aucuns considèrent que le Parlement actuel, compte tenu de sa composition, n’est pas en mesure d’assurer l’élection d’un chef de l’État aux deux tiers des voix.
Selon des observateurs politiques, si le dossier de la présidentielle refait surface actuellement, c’est parce qu’il existe une volonté de le soustraire aux tiraillements politiques en tentant de mettre en place un package deal autour de la présidentielle, de la loi électorale et du gouvernement. En d’autres termes, il s’agit d’aboutir à une sorte de nouvel accord de Doha. Une tentative qui explique, pour certains, le blocage actuel au niveau du dossier gouvernemental que des parties politiques exploiteraient afin d’aboutir à ce package deal.
Organiser cependant les législatives avant la présidentielle commande impérativement une prolongation du mandat du président Michel Sleiman, ce dernier devant superviser la consultation populaire. Cela suppose éventuellement un retour à l’échéance qui prévalait avant Taëf pour ce qui est de l’élection présidentielle. Le chef de l’État devait être élu à l’époque avant la date butoir du 23 septembre.
On ignore cependant si un tel scénario serait accepté par le président qui refuse catégoriquement une rallonge de son mandat. Mais de sources diplomatiques, on indique que le dossier de la présidentielle et les différents scénarios avancés commencent à attirer l’attention des décideurs arabes et internationaux. De mêmes sources, on affirme que les noms d’éventuels présidentiables commencent à être passés en revue. Dans ce contexte, les visiteurs de certaines capitales font état de quatre formules en cours. La première consiste à convaincre Michel Sleiman, soucieux de respecter le principe de l’alternance au pouvoir, d’accepter une rallonge de deux ans de son mandat pour superviser les législatives de sorte que son successeur soit élu par la nouvelle Chambre. La deuxième consiste à hisser une figure économique à la magistrature suprême. Dans ce cadre, c’est le nom du gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé, qui est avancé. La troisième porte sur l’élection d’une personnalité politique. Trois noms ont la cote : un ancien ministre, un ministre et un député actuels. Quant à la quatrième, elle se rapporte à l’élection d’une personnalité militaire, en l’occurrence le commandant en chef de l’armée, le général Jean Kahwagi.
Il semble que ces quatre formules soient minutieusement étudiées par les décideurs, soucieux d’éviter un vide institutionnel au Liban. De sources diplomatiques, on fait état à ce propos d’une décision internationalo-régionale de garantir l’élection d’un chef de l’État dans les délais constitutionnels et d’éviter coûte que coûte un vide similaire à celui de 2007.
Au niveau local, les forces du 14 Mars accusent cependant le Hezbollah de chercher à maintenir le blocage actuel en attendant de voir l’évolution de la situation en Syrie et des rapports américano-iraniens. Selon elles, le parti chiite a intérêt à ce que l’équipe Mikati reste en place, ce qui lui permet, avec les composantes du 8 Mars, d’imposer ses conditions et éventuellement d’appeler à l’organisation d’une assemblée constituante au cas où une entente saoudo-iranienne n’aurait pas lieu.
Le chef de cette formation, Hassan Nasrallah, se serait ainsi rendu en Iran début septembre, au moment où les Américains menaçaient de lancer des frappes contre Damas, et aurait présidé à son retour à Beyrouth une série de réunions de concertations, dont un des aboutissements a été de demander au président de la Chambre, Nabih Berry, de prendre contact avec le courant du Futur dans la perspective d’une prise de langue ultérieure avec la formation de Saad Hariri. M. Berry a effectivement entamé des contacts avec le chef du bloc parlementaire du Futur, Fouad Siniora, qu’il est appelé à voir sous peu pour poursuivre avec lui les contacts entamés depuis quelque temps.
C’est peut-être dans ce contexte d’ouverture qu’il faut placer la décision du Hezbollah de démanteler les Brigades de la résistance à Saïda, puis à Tripoli. Une mesure que le 14 Mars juge cependant insuffisante, puisque ce rassemblement considère que le parti chiite devrait retirer ses forces de Syrie s’il veut donner un signal positif en direction de ses adversaires.
L’Orient Le Jour