A quelques semaines du début de Roland-Garros, qui se déroulera du 16 mai au 5 juin, la Fédération française detennis (FFT) se serait bien passée de ce nouvel épisode judiciaire. Alors que la direction du tournoi avait convoqué lesmédias mardi 3 mai au matin pour la présentation officielle de l’édition 2016, on apprenait en fin d’après-midi que les locaux de la FFT, situés dans l’enceinte du stade, avaient été perquisitionnés le même jour.
« Cette enquête préliminaire, diligentée par le procureur de la République, ferait suite aux travaux de l’inspection générale du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports qui ont été largement évoqués dans la presse », réagit de façon succincte la FFT dans un communiqué.
Plus précisément, cette perquisition s’inscrit dans le cadre de l’enquête ouverte le 19 mars par le parquet national financier, portant sur des faits de détournement de biens et trafic d’influence au sein de la FFT. Le signalement de l’inspection générale de la jeunesse et des sports, rappelle le parquet, est relatif « à l’existence d’un système de revente occulte de billets à l’occasion du tournoi des Internationaux de France et aux conditions d’attribution du marché de la rénovation et de l’agrandissement du stade Roland-Garros ».
Lettre de dénonciation
L’investigation avait été lancée après réception en 2015 d’une lettre de dénonciation. Alerté, le ministère des sports avait décidé, en septembre, d’envoyer deux de ses inspecteurs générauxinterroger élus et salariés de la FFT. Au fil des mois et des entretiens, le duo a mis le doigt sur les frais de bouche exorbitants du président de la FFT, Jean Gachassin, et les deux voitures de fonction – une à Paris avec chauffeur, une à son domicile de Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées) –, dont sa femme profitait allégrement.
Lire aussi : Tennis : la Fédération française au bord de l’implosion
Les deux inspecteurs se sont aussi rendu compte que M. Gachassin avait, pendant plusieurs années, à la tête de la ligue de Midi-Pyrénées puis de la fédération, vendu par centaines, à une agence de voyages de son Sud-Ouest natal tenue par un ami, les places pour Roland-Garros dont il bénéficiait. Agence qui en faisait ensuite un commerce lucratif, et emmenait par ailleurs régulièrement M. Gachassin, ancien rugbyman, assister aux matchs du Tournoi des six nations, tous frais payés. Enfin, les inspecteurs ont appris que, en plein appel d’offres pour les travaux de modernisation de Roland-Garros, M. Gachassin partageait l’apéritif avec un collaborateur de Vinci, l’un des trois groupes en lice, qui sera finalement désigné.
« Il faut arrêter le fantasme »
« Il faut arrêter le fantasme », a réagi Me Xavier Autain, l’avocat de M. Gachassin, auprès de France Info :
« Jean Gachassin, comme tout dirigeant de fédération, a droit à un certain nombre de billets. Il ne les a pas utilisés et a permis à des tiers de les acheter, mais de les acheter directement (…). Les sommes ont été directement encaissées par la fédération. »
L’avocat a par ailleurs réclamé d’avoir accès aux pièces du dossier.
« Le parquet national financier, assisté de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales, a conduit ce jour plusieurs perquisitions au siège de la Fédération française de tennis, dans les bureaux de la société Havas Voyages La Dépêche à Tarbes ainsi qu’au domicile personnel du président de la FFT », précise le parquet, qui ajoute que « les opérations menées ont permis de saisir des documents utiles à l’enquête ».
De son côté, la FFT fait savoir que « les équipes de la Fédération, élus et salariés, collaborent pleinement avec les enquêteurs. La Fédération française de tennis n’a pas de commentaire àfaire à ce stade de la procédure. Elle se réserve de se constituer partie civile si des faits délictueux devaient être révélés par l’enquête ».