Chris Patten (ici en 2017, à Hongkong) a été le dernier gouverneur de la concession britannique, de 1992 à 1997.
INTERVIEW – Le dernier gouverneur britannique de Hongkong (1992-1997) dénonce la «trahison» de la Chine, et appelle les démocraties à s’unir face au Parti communiste, lors d’un entretien avec des correspondants étrangers basés en Chine.
LE FIGARO.- La Chine rompt-elle ses engagements en imposant la loi de sécurité nationale à Hongkong?
Chris PATTEN.-Cette nouvelle législation est une violation flagrante de la «Loi fondamentale» de Hongkong et de la déclaration sino-britannique que la Chine a signée en 1984. Pékin est obligé de respecter ce traité international de l’ONU jusqu’en 2047, garantissant l’autonomie de Hongkong. Il n’y a pas un manque de droit à Hongkong, il y a seulement un manque de ce que le Parti communiste veut. Cette loi de sécurité nationale a été rejetée par le monde des affaires en 2003. Mais ils s’en fichent. Je suis inquiet.
Cette loi porte-t-elle la marque de Xi Jinping?
Hongkong représente tout ce que Xi Jinping attaque, notamment la liberté d’expression. Après la rétrocession de 1997, la Chine a respecté ses obligations pendant une douzaine d’années. Les choses ont changé avec son arrivée au pouvoir. Depuis 2014, Pékin refuse tout dialogue. Le Parti a espéré profiter du fait que le monde est accaparé par la pandémie pour passer cette nouvelle loi. Mais la façon dont Pékin se comporte à Hongkong, ou en mer de Chine du Sud, est digne de la mafia, et va entraîner une réévaluation de relations du monde avec la Chine.
Que faire face à la Chine?
Nous devons confronter ce régime nuisible, et ses méthodes de brutes. Les démocraties doivent travailler ensemble, pour obliger la Chine à respecter les règles. Il faut remettre à plat nos relations, regarder là où elle vole nos technologies, revoir nos chaînes d’approvisionnement. Cela est plus facile à faire s’il y a une Administration américaine prête à travailler avec ses alliés.
Cette loi va-t-elle décapiter le mouvement démocratique?
On peut craindre que le régime utilise la nouvelle loi pour disqualifier les candidats de l’opposition aux élections locales de septembre. Les leaders de la cause prodémocratie, comme Martin Lee (fondateur du Parti démocratique) sont la conscience de Hongkong. Ils marchent dans le sens de l’histoire, sur les traces de Nelson Mandela ou de Martin Luther King, car ils représentent des idées qui ne peuvent être enfermées. Ce sont eux qui resteront dans l’Histoire, et non Xi Jinping et ses mafiosi.