La capitale iranienne est en train de connaître l’inimaginable. Ces derniers jours, de nombreux sites iraniens ont publié des photos de murs de Téhéran d’où le slogan « Mort à l’Amérique » a été effacé. Une nouvelle série d’images montre que ce même slogan, suivi de « 2015 », référence à l’année actuelle du calendrier grégorien, ou de « 1394 », l’année actuelle iranienne, a été occulté par une couche de peinture sur les murs de l’ancienne ambassade américaine à Téhéran, fermée depuis 1980.
Peu après la révolution iranienne en 1979, le bâtiment avait été envahi par des étudiants islamistes qui y avaient retenu en otage des diplomates américains pendant 444 jours. Cet immeuble, situé au plein centre de Téhéran et surnommé « Nid de l’espionnage », a été transformé en musée et reste le symbole de l’animosité et de la méfiance entre les deux pays, qui n’ont plus de relations diplomatiques depuis trente-cinq ans. Washington est notamment haï en Iran à cause de son implication dans le coup d’Etat qui a renversé, en 1953, le premier ministre iranien démocratiquement élu Mohammad Mosadegh, un personnage adulé par les Iraniens pour avoir nationalisé le pétrole.
« Puissances arrogantes »
Aucune information n’a pour le moment été rapportée quant à l’organisation qui se trouve à l’origine de l’effacement des slogans anti-américains des murs de Téhéran. Or, cet événement survient deux mois et demi après la signature de l’accord, conclu le 14 juillet à Vienne, sur le dossier nucléaire de Téhéran, avec les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’Organisation des nations unies (Etats-Unis, Royaume-Uni, France, Russie, Chine), plus l’Allemagne.
Sans surprise, la réaction des conservateurs n’a pas tardé. « Ceux qui pensent qu’avec l’accord nucléaire, les Etats-Unis pourront retourner en Iran, doivent savoir que les puissances arrogantes ne tiendront pas leurs engagements », a réagi, dans un communiqué, l’organisation du Bassidji, la force paramilitaire iranienne, lundi 31 août. « Cet accord n’écartera pas le slogan « Mort à l’Amérique » mais, au contraire, le renforcera », a prévenu cette organisation, connue pour ses prises de position radicales.
Bien que la disparition du slogan « Mort à l’Amérique » semble être un incident isolé – la grande fresque « DOWN WITH THE USA », sur l’avenue Karim-Khan-Zand, au centre de Téhéran, restant intacte –, les réactions qu’elle a créées témoignent de la réticence de certains milieux politiques à voir changer les politiques iraniennes, dont l’hostilité pure et dure, au moins dans la rhétorique, envers les Etats-Unis.
Pour que «Mort à l’Amérique» disparaisse complètement, selon le chef de la Cour suprême, Ali Montazeri, il ne faut qu’une chose : « l’ordre du Guide suprême » Ali Khamenei, l’autorité numéro un en République islamique d’Iran.
Dans un discours prononcé le 17 août, ce dernier a essayé, justement, de rassurer les détracteurs de l’accord qui craignent un assouplissement de la République islamique ou une renonciation à ses principes fondamentaux. « Les responsables américains cherchaient, à l’aide de l’accord nucléaire, à trouver un chemin pour s’infiltrer dans le pays, mais nous bloquerons ce chemin, de manière déterminante, a-t-il annoncé. Nous ne permettrons aucune intrusion économique, ni politique, ni culturelle. »