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Source bien informée
Chers amis qui êtes attentifs à la situation des chrétiens d’Orient. Je reviens de Rome, où j’ai assisté à la réunion annuelle des Associations d’aide catholiques aux chrétiens du Proche-Orient ROACO). Nous avons eu hier une rencontre avec le Pape, qui a lancé un appel en faveur de la paix en Syrie. Vous en trouverez un bon compterendu dans cet article de La Croix :
http://www.la-croix.com/Religion/Urbi-Orbi/Rome/Benoit-XVI-s-inquiete-d-une-generalisation-du-conflit-syrien-_NP_-2012-06-21-821515
La veille, nous avions rencontré toute la matinée Mgr Mario Zenari, nonce apostolique à Damas, évoqué aussi dans cet article, avec lequel nous avons eu un échange passionnant et très éclairant. Mgr Zenari est un de ces grands formats de la diplomatie vaticane, à l’information extrêmement dense et aux jugements nuancés. Il fut en poste précédemment en Côte d’Ivoire et au Sri Lanka, c’est dire s’il peut apprécier les dynamiques perverses à l’œuvre dans des pays qui sont en proie à un processus de guerre civile. S’agissant de la Syrie, il nous en a dit beaucoup plus que ce qu’a retenu l’article de La Croix à partir d’une brève interview sur Radio-Vatican. Je soulignerai quelques points sur lesquels j’attire votre attention et dont vous pouvez relayer la substance :
1°) L’insurrection est une vraie insurrection populaire, contre un régime dictatorial sanglant ayant favorisé depuis longtemps un réseau de corruption éhonté et ayant continûment brimé les libertés individuelles. Elle n’était cependant pas attendue, car la situation économique était plutôt satisfaisante, comparée à celle de pays voisins, et certains progrès avaient été enregistrés dans le sens d’une moins grande férocité du régime.
2°) Qu’il y ait des éléments salafistes et étrangers infiltrés dans l’insurrection, cela ne fait pas l’ombre d’un doute. Mais dans leur majorité, les cadres de l’insurrection ne sont pas radicaux et certainement pas anti-chrétiens. Mgr Zenari a continué et continue à avoir avec eux d’excellentes relations.
3°) Il n’y a pas de chasse systématique aux chrétiens de la part des insurgés. Même à Homs ou à Qusayr, où la situation extrêmement critique est due aussi à des problèmes de rivalités inter-tribales voire maffieuses qui ne datent pas d’hier. Des chrétiens ont été victimes de bombardements ou d’escarmouches, comme beaucoup de sunnites ou d’alaouites, mais ils n’étaient pas ciblés comme chrétiens. Aucun sanctuaire chrétien n’a été attaqué en tant que tel. Mgr Zenari confirme que la rhétorique alarmiste que certains hiérarques (comme Mgr Jeanbart d’Alep, et même, hélas, le patriarche grec-melkite-catholique Gregorios III) ou religieu(se)s (comme Mère Agnès-Mariam de la Croix) prétendant que les chrétiens sont traqués par les forces révolutionnaires qui veulent leur éradication procède de la désinformation. Certaines personnalités ecclésiales sont manifestement stipendiées ou manipulées par le régime pour attiser les rumeurs le présentant comme le seul défenseur de la minorité chrétienne et soulever le spectre d’un scénario à l’irakienne. Leur attitude confine à la collaboration, qu’ils pourraient payer très cher.
4°) Mgr Zenari nous a donné maints exemples d’extraordinaires actes de solidarité entre chrétiens et musulmans au plus fort de la tourmente. Il précise que loin d’être « persécutés », les chrétiens, du moins jusqu’à présent, sont plutôt respectés et ménagés, tant par l’armée que par les forces insurrectionnelles. Il suffit d’être reconnu comme chrétien à un barrage ou à un check point pour éviter toute difficulté majeure.
5°) Les membres de la ROACO et la hiérarchie catholique attirent l’attention sur l’activisme du prétendu Mgr Philippe Tournyol Clos, « évêque de l’Eglise grecque-melkite-catholique », dont énormément de médias ont relayé « une mission en Syrie » au terme de laquelle il dénonce le caractère islamiste de l’insurrection, les massacres systématiques des chrétiens , la désinformation à l’œuvre dans les médias internationaux (voir par exemple :
http://www.diatala.org/article-syrie-mgr-tournyol-clos-les-dits-liberateurs-mercenaires-detruisent-les-eglises-et-egorgent-les-106443119.html)
Mgr Tournyol Clos en appelle pour sa part au « parler vrai » et à la dénonciation du génocide dont seraient victimes les chrétiens de Syrie. LE SAINT-SIEGE PRECISE QUE CE PERSONNAGE N’EST ABSOLUMENT PAS MEMBRE DE LA HIERARCHIE CATHOLIQUE, IL N’A DROIT A AUCUN DES TITRES DONT IL SE REVENDIQUE. Ses allégations sont fausses et manipulées. Il est tout sauf un représentant du « parler vrai ». Le nonce l’a rencontré à Damas, revêtu d’habits ecclésiastiques usurpés… Le personnage lui a avoué ne s’être jamais rendu à Homs alors qu’il prétend avoir été témoin oculaire de la chasse aux chrétiens. Pendant la réunion de la Roaco, Mgr Gollnisch, directeur de l’Œuvre d’Orient, a reçu un appel d’urgence des jésuites de Homs lui demandant d’intervenir auprès du St-Siège et de l’Agence Fides, qui a reproduit les propos du pseudo Mgr Tournyol, car ceux-ci mettaient en danger les jésuites qui ont toujours tenu à maintenir le dialogue entre toutes les communautés. En fait, ledit Tournyol est un transfuge des milieux catholiques intégristes et d’extrême-droite, inconnu au bataillon de tous ceux qui ont une bonne connaissance et une longue fréquentation des chrétiens d’Orient. Il est important de relayer dès que vous le pouvez cette information et de démasquer l’imposture représentée par Tournyol Clos. Un petit détour sur le site officiel http://www.catholic-hierarchy.org/bishop/ donnant la liste des évêques de l’Eglise catholique vous convaincra que ce personnage en est absent. Voilà encore un exemple frappant de manipulation venant de cercles douteux à propos de la situation en Syrie. L’Oeuvre d’Orient ne devrait d’ailleurs pas tarder à diffuser un communiqué de presse.
6°) Concernant notre ami le Père Paolo Dall’Oglio, obligé de quitter le pays par ordre de son évêque, il faut savoir que cette mesure ne représente pas un désaveu de son action par le St-Siège. Seulement, comme le P. Paolo n’est pas syrien, il paraît plus sage qu’il se tienne à distance du débat. D’autre part, sa vie était en danger car ses positions en faveur du dialogue dans le respect des justes revendications de l’opposition, son refus de s’associer à la logorrhée qui, pour défendre le régime, agite l’épouvantail d’un génocide anti-chrétien, lui valaient l’inimitié dangereuse des sbires du clan Assad. Vous pouvez relayer abondamment ce message. Merci.