INFO LE FIGARO – Cette station d’observation déployée au printemps par Moscou à Kessab, près de la frontière avec la Turquie, permet au régime de surveiller les rebelles syriens dans cette zone stratégique.
Pour la Russie, ce déploiement auprès de son allié syrien répond à un double objectif, affirme une source occidentale: d’une part surveiller les installations de l’Otan de l’autre côté de la frontière, en Turquie, notamment la base américaine d’Adana, juste en face ; d’autre part, offrir au régime de Bachar el-Assad les moyens de mieux observer ce qui se passe côté turc de cette frontière, où sont repliés sous la bannière de l’Armée syrienne libre (ASL) des centaines d’opposants armés au pouvoir de Damas.
Située à une trentaine de kilomètres au nord de Lattaquieh, Kessab est une enclave peuplée à l’origine d’Arméniens, qui ont été remplacés au siècle dernier par des Alaouites, la minorité qui soutient le régime de Bachar el-Assad. Aujourd’hui, sa population est composée à parité environ d’Arméniens fidèles au régime et d’Alaouites. «À 1300 mètres d’altitude, Kessab est un promontoire stratégique pour le régime syrien, qui lui permet de voir ce qui se passe du côté turque de la frontière voisine mais aussi sur ses arrières», poursuit la source.
Surveiller les rebelles
Kessab se trouve à moins de dix kilomètres des premiers villages du djebel Akrad, tenu aujourd’hui par les rebelles, et qui pourrait se transformer en zone libérée par l’ASL et ses alliés turcs, occidentaux et des monarchies du Golfe. Pour contrer une telle menace, l’armée syrienne s’est lancée la semaine dernière dans une offensive contre Haffeh, enclave sunnite dans ce djebel Akrad, dont ses habitants ont préféré finalement fuir plutôt que d’être liquidés par les troupes syriennes. L’installation de la station radar de Kessab s’inscrit très certainement dans la défense de cette portion du territoire syrien limitrophe de la Turquie.
Ces derniers jours, la Russie a été accusée par les États-Unis d’avoir livré des armes, qui ont permis à Damas d’accentuer sa répression des opposants. Moscou a riposté en démentant de telles livraisons d’armes, et en accusant à son tour les États-Unis et certains pays du Golfe de fournir des munitions à la rébellion.
Cette nouvelle implantation russe au cœur d’une zone stratégique pour la défense du régime syrien pourrait amener la CIA à partager avec les rebelles davantage de renseignements sur les positions de leurs ennemis. Jusqu’à présent, les services américains affichaient une réticence à livrer aux opposants syriens des informations sensibles – a fortiori des armes – de peur d’une mauvaise utilisation.
La Russie disposerait d’autres stations d’écoutes à travers la Syrie, notamment près de Damas, sur les hauteurs du mont Qassioun.