Comme vous, je suis préoccupée par la situation du Liban, et par l’abattement avec lequel la communauté internationale, semblant impuissante, réagit ou, pour le dire plus brutalement, ne réagit guère.
Comme vous, je suis indignée du coup de force tenté une fois encore par ceux qui persistent à préférer pour leur pays et leur peuple, et pour la région entière, la perpétuation de la violence.
Je partage depuis de longues années, vous le savez, les combats des démocrates du Liban. J’ai eu l’occasion, en écoutant différents acteurs du mouvement démocratique libanais, de comprendre mieux la situation de ce pays. De mesurer combien, pour la stabilité, la paix et le changement démocratique dans la région, ce qui se passe et ce qui se vit au Liban est essentiel.
Il y a deux ans, j’ai organisé au Sénat un colloque avec le Mouvement de la gauche démocratique libanaise, le Courant du futur et l’association Rassemblement pour la démocratie au Liban. J’ai vu à cette occasion combien et comment la société libanaise, à partir de son histoire particulière, à partir de ses propres traditions et de ses propres ressources, pouvait inventer des formes nouvelles – et probablement inédites dans la région – de cohabitation entre la laïcité et les héritages confessionnels. C’est cette recherche d’institutions adaptées au contexte libanais, conçues dans le respect de l’identité de toutes les composantes de la société libanaise, qui permettra de désamorcer les germes de tous les conflits communautaires.
Je sais que, pour assurer cette ambition, il faudra que cesse la violence et que le Liban voit reconnue son indépendance et sa liberté.
La solution ne pourra être qu’une solution politique.
Ayons le courage d’affirmer, aussi bien face à ceux qui, soutenus par de puissants voisins, créent le trouble dans le pays, qu’à ceux qui, dans la communauté internationale, refusent d’entamer le dialogue avec tel ou tel des belligérants il n’y aura de solution durable à ce qui se noue au Liban ni par la violence, d’où qu’elle vienne, ni par l’exclusion des uns ou des autres de la table des discussions.
Il n’y aura pas de solution sans dénonciation de la violence, d’une part, mais pas non plus, , d’autre part, sans ouverture d’un dialogue – et ce sera difficile – avec celles et ceux qui ont armé, hier ou aujourd’hui, la violence.
Ne nous voilons pas la face: le Liban ne trouvera pas de réelle stabilité tant que la coexistence des États palestinien et israélien ne sera pas réglée, et qu’une véritable pacification des relations avec la Syrie permettra à celle-ci de renoncer à ses intérêts d’un État faible au Liban. Et cette paix régionale ne se fera que quand la communauté internationale, dont la France, acceptera d’en payer le prix, notamment celui de ses propres intérêts dans la région.
Cependant le Liban a évidemment son propre rôle à jouer, et aujourd’hui plus que jamais, il peut être le moteur par l’exemple d’un processus de paix et de démocratie dans la région.
Nous le savons tous et toutes, le chemin vers cette solution sera long.
Il sera semé d’embûches et d’incendies, allumés par celles et ceux qui veulent enfoncer le pays dans le pire.
Il sera fait de déceptions, de doutes et de larmes, et tous n’en verront pas, ne pourront pas probablement en voir la fin.
Mais c’est ce chemin qui vaut que, chaque jour, le Liban résiste. Et c’est parce que nous pensons, chaque jour, et plus vivement encore ces derniers jours, aux visages du Liban, à celles et ceux que là-bas nous aimons, c’est parce que nous éprouvons en nous-mêmes la fragilité de leurs vies mais aussi la force de leur désir d’une vie normale, simplement normale ; d’une vie simple, faite de paix, de sécurité et de droit à construire, librement, sa propre vie ;
C’est parce que nous savons tout cela que nous poursuivrons sur ce chemin, chacun à notre place.
Et c’est pour ces raisons que vous avez non seulement tout mon soutien et toute ma solidarité mais aussi, et très sincèrement, ma plus vive admiration.