Le respect de la période constitutionnelle pour l’élection du président, c’est là l’enjeu. Il faut que les forces du 14 Mars ne se trompent pas de bataille. Le quorum de deux tiers ou de 50% plus un constitue un enjeu secondaire que la majorité pourrait transformer, le moment opportun, en une carte de pression contre l’opposition. La majorité est la majorité, c’est la vérité sortie des urnes. Pourquoi alors faut-il en douter et permettre ainsi au Hezbollah de gagner une manche politique à moindre frais ?
Cette élection à la date prévue par la constitution est stratégique, parce qu’elle mettra fin à la mainmise de la Syrie sur les institutions libanaises et élargira, en même temps, le champs de manœuvre de la majorité. Parce qu’aussi elle permettra de rendre au parlement son rôle central dans la vie politique libanaise : le débat pourrait alors se faire en public, là ou l’histoire politique du Liban a voulu qu’il soit, c’est-à-dire au parlement.
L’importance de cet événement ne permet pas d’y faire face avec légèreté. La multiplication des déclarations des responsables politiques et la polémique avec l’opposition sur le quorum ont donné à Hezbollah et ses alliés, encore une fois, l’opportunité de continuer le marchandage, alors qu’une bonne lecture de la situation confirmerait que les institutions du pays sont le dernier souci de l’opposition, en particulier de Hezbollah. Etant donné que M. Aoun confond tout est son contraire, en occurrence lui-même.
La stratégie des forces du 14 Mars s’est montrée encore défaillante sinon inexistante. Des questions se posent à cet égard sur la cohérence de ses forces, sur leurs intentions respectives. Certains peuvent s’interroger sur leur abandon de la mobilisation populaire, de leur base socio-politique , moteur de la victoire contre le régime syrien et son appareil militaire. L’importance de l’enjeu ne nécessite-t-elle pas un tel recours ?
Aussi, la majorité pourrait, le moment opportun, transformer la question du quorum en slogan politique efficace, en faisant de la présence de la majorité des députés le jour de l’élection du futur président un acte de loyauté à la constitution. La mobilisation populaire serait, là aussi, un atout majeur. Cette action retirera à l’opposition cette carte de pression et de chantage.
Enfin pourquoi cette passivité ? Le centre de la capitale est toujours occupé, constituant volontairement une menace pour la paix civile. Il y a là un champ de mobilisation contre Hezbollah, surtout contre Aoun, le prétendant à la fonction suprême, amoureux du pays et de l’ordre ! N’y-t-il pas ici aussi une possibilité d’un manœuvre tactique pour maintenir la pression sur l’opposition ?
On peut citer nombre dossiers que la majorité a abandonné comme on quitte à la hâte un champ de bataille avant le déclenchement de l’hostilité. Elle peine pour convaincre ses propres rangs de ses initiatives. Souvent elle confond stratégie et tactique, alors qu’elle joue très souvent sur le terrain de l’adversaire. Le temps est compté. Il faut sortir du jeu politique du court terme, tant apprécié de l’élite politique libanaise.
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