L’ÉCLAIRAGE
Le Hezbollah n’a jamais vraiment adopté ni accepté la déclaration de Baabda. Selon des députés du 14 Mars, le Hezb se serait opposé à la politique de distanciation dès le départ, mais l’aurait ouvertement sapée en envoyant des combattants en Syrie. Hassan Nasrallah a alors justifié cette campagne comme étant une tentative de défense des lieux saints chiites en Syrie et de la communauté chiite au Liban-Sud, avant de l’assimiler à la lutte contre Israël et les takfiristes, pour enfin affirmer au grand jour vouloir soutenir l’axe irano-syrien. Et c’est alors que les députés et les cadres du Hezbollah ont fait part de la « mort » de la politique de distanciation par une successions de formules et de déclarations successives. Mais pour le 14 Mars aussi, à bien des égards, le Hezbollah, même s’il le voulait, ne peut pas retirer ses combattants de Syrie, car cette décision ne revient qu’aux pasdaran iraniens qui ont dicté au parti chiite leur volonté de soutenir militairement le régime syrien.
Mais dans ce contexte, un ancien député du 8 Mars indique que le Hezbollah a commencé une opération de réduction de son effectif militaire en Syrie, rapatriant un grand nombre des ses combattants, suite aux récents développements sur la scène syrienne au nouveau projet russo-américain pour tenter de régler la crise. Pour beaucoup, de ce fait, les prochaines semaines promettent d’être chargées en développements politiques sur la scène libanaise.
Étrangement, c’est l’allié chiite du Hezbollah, le mouvement Amal, en la personne du président de la Chambre, Nabih Berry, qui se pose en véritable défenseur de la déclaration de Baabda. Dans plus d’une déclaration, il a assuré que les points contenus dans le document sont de nature à préserver la sécurité des Libanais, admettant par la même occasion que de nombreuses parties n’ont pas respecté la teneur de cet accord. Il a même pris l’initiative ces derniers jours d’appeler activement au dialogue tous les protagonistes de la scène locale pour redonner vie à la déclaration de Baabda.
Cette initiative et celle que compte proposer le Premier ministre démissionnaire Nagib Mikati la semaine prochaine viseraient en effet à unifier la politique du Liban à l’égard des dossiers externes pour permettre ainsi – et enfin – la formation d’un gouvernement qui, jusque-là, n’arrive pas à voir le jour. Il semblerait donc que le problème du cabinet Salam ne soit pas lié au tiers de blocage ou à la formule armée-peuple-résistance, mais principalement à la politique de distanciation, nécessaire pour pouvoir décider plus tard d’une stratégie de défense pour le pays. D’autant, il serait impossible d’accueillir le Hezbollah au sein d’un gouvernement alors que ses combattants se trouvent encore en Syrie pour ne pas cautionner officiellement cette intervention.
Le président pourra-t-il réunir à nouveau les Libanais autour de la déclaration de Baabda ? « Peut-être », estiment des responsables informés qui voient dans « l’éclaircie » politique régionale et internationale sur la Syrie une opportunité pour le président de concrétiser son souhait de recadrer la classe politique sur les dossiers internes loin des crises de la région, en particulier du conflit syrien. Le deal russo-américain aurait ainsi influencé positivement la scène locale, facilitant par la même occasion la formation tant attendue du cabinet Salam.