(Lettre de Souheïr AL ATASSI, 02.02.11)
Alors qu’un petit groupe de citoyens syriens, désireux de manifester leur soutien aux Egyptiens en lutte pour recouvrer leurs droits et leur liberté, était réuni, bougies à la main, mercredi 2 février sur la place de Bab Touma, nous avons été agressés par des partisans et partisanes du régime en nombre supérieur qui ont ordonné aux manifestants de vider immédiatement les lieux. La Police, qui avait assisté sans intervenir aux manifestations identiques tenues les jours précédents, était ce soir-là étrangement distante.
Après avoir subi les insultes et les coups des agresseurs, qui n’ont pas hésité à revendiquer leur appartenance à « la sécurité », nous nous sommes rendus au poste de police de la place, dont les agents assistaient de loin à la scène. Nous avons déclaré vouloir déposer deux plaintes: l’une contre nos agresseurs, l’autre contre les policiers qui s’étaient abstenus d’intervenir. Au lieu d’enregistrer les demandes, les policiers ont chassé du poste l’ensemble des protestataires. Ils m’ont demandé de patienter à l’intérieur.
Une demi-heure plus tard, un officier des moukhabarat en habits civils est arrivé. Refusant de décliner son identité, il m’a aussitôt insultée en des termes d’une incroyable grossièreté. M’accusant de servir de « tête de pont d’Israël » et de nuire à la Syrie, il n’a pas supporté que je lui réponde point par point. Il m’a giflée sur la joue gauche, pour me punir d’avoir écarté sa main qu’il tendait vers moi menaçante. Il m’a arraché mon sac, qu’il a fouillé et dans lequel il a pris mon appareil photo et mon téléphone mobile, qu’il a emportés avec lui hors de la pièce en déclarant que j’étais « arrêtée ». Avant de quitter définitivement les lieux avec ses deux accompagnateurs, il m’a suggéré de « m’attendre à tout moment désormais à ce que quelqu’un tente de me tuer dans la rue, pour délivrer le pays de virus de mon espèce »
Relâchée un peu plus tard par les policiers, avant de récupérer mon téléphone et mon appareil photo vidé de toute image et de retrouver mes camarades sur le seuil du commissariat, j’ai remarqué l’air honteux d’un officier de Police. Il avait assisté impuissant à la scène, dans un lieu en principe dédié, selon le slogan affiché sur tous les postes de police de Syrie, «au service du peuple»…
*Damas