Les scandales de dopage et de corruption qui frappent les fédérations internationales d’athlétisme et de football sont au centre de la commisssion exécutive du Comité international olympique (CIO) qui se tient à Lausanne jusqu’au 10 décembre. Dans une tribune au Monde, son président, Thomas Bach, exhorte « toutes les organisations sportives » àmettre en place « des politiques de tolérance zéro » et préconise de confier la gestion des contrôles à l’Agence mondiale antidopage et les sanctions au tribunal arbitral du sport.
Les récents événements survenus dans certains sports sont particulièrement inquiétants pour moi qui suis médaillé olympique. Ce qui m’attriste le plus en tant qu’ancien athlète est que ces événements portent atteinte à la confiance que l’on place dans l’athlète intègre. Les athlètes intègres qui s’investissent jour après jour pour poursuivre leurs rêves sont désormais eux aussi pointés du doigt. Il s’agit là de l’effet le plus pernicieux du dopage. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger ces millions d’athlètes intègres à travers le monde. Dans leur intérêt et pour la crédibilité des compétitions sportives, les athlètes doivent être protégés du dopage et de la corruption.
Nous devons également préserver la crédibilité des compétitions sportives des arrangements et de la manipulation de matchs. Le CIO a créé un fonds spécial de 20 millions de dollars américains pour la protection des athlètes intègres. Ce fonds vient s’ajouter aux investissements internationaux estimés à 500 millions de dollars américains pour la réalisation de près de 250 000 contrôles de dopage par an, entre autres initiatives. Le CIO a adopté une politique de tolérance zéro à l’égard du dopage et de toutes les autres formes de manipulation et de corruption.
Le mouvement sportif a besoin du soutien des gouvernements
Les athlètes dopés encourent, dès leur première infraction, une interdiction de participation de quatre ans à toute compétition sportive. Cela implique qu’ils ne pourront pas participer à l’édition suivante des Jeux olympiques. Dans ma jeunesse, j’avais appelé à une suspension à vie dès la première infraction. Hélas, aucun tribunal n’aurait confirmé une telle sanction. Toutefois, nous pouvons faire en sorte que le système de lutte contre le dopage soit plus indépendant des organisations sportives. A cet égard, le CIO a pris l’initiative de demander à l’Agence mondiale antidopage (AMA), l’autorité internationale responsable de la lutte contre l’utilisation des substances dopantes dans le sport, d’envisager de prendre à sa charge les programmes de contrôle des fédérations internationales de sport. Le CIO a en outre proposé au tribunal arbitral du sport (TAS), l’organe judiciaire suprême pour le monde du sport, de se charger de sanctionner tous les athlètes dopés.
Une politique de tolérance zéro signifie le respect total des règles de l’AMA par tous les pays et par tous les sports. Dans ce domaine, le mouvement sportif a besoin du soutien des gouvernements. N’oublions pas que les gouvernements participent à hauteur de 50 % au financement de l’AMA. Les gouvernements doivent veiller à ce que leurs autorités nationales antidopage se conforment aux exigences de l’AMA. Les gouvernements doivent également s’assurer que les revendeurs de drogue ainsi que les médecins et les entraîneurs corrompus sont punis le plus sévèrement possible.
La protection de l’athlète intègre va de pair avec un environnement sûr et exempt de corruption. Afin de lutter contre la manipulation dans le sport et en particulier contre l’arrangement de matchs et les paris illégaux, le CIO et les fédérations internationales de sport travaillent d’ores et déjà en étroite coopération avec la police et avec les opérateurs et régulateurs de paris à travers le monde. Pleinement conscient du caractère international du crime organisé, le CIO est aussi mobilisé aux côtés d’Interpol afin de préserver l’intégrité du sport.
Des politiques de tolérance zéro
Lutter contre la corruption signifie par ailleurs que la bonne gouvernance des organisations sportives est essentielle. Le CIO a pris les mesures nécessaires en ce sens depuis longtemps. Plus récemment, le train de réformes adopté dans le cadre de l’Agenda olympique 2020, il y a exactement un an, préconise des normes internationalement reconnues en termes de gouvernance. Par conséquent, tous nos comptes font l’objet d’audits, conformément aux normes internationales d’information financière (IFRS), et le tout est publié dans notre rapport annuel, ce qui est une pratique courante dans le monde des affaires. Nous avons fixé une durée de mandat et un âge limites pour tous les membres du CIO, nous avons aussi nommé un chief officer éthique et conformité ainsi qu’un comité d’audit et une commission d’éthique indépendante. Nous avons appelé toutes les organisations sportives à en faire autant et espérons qu’elles le feront. Toutes ces mesures et bien d’autres, qui ont été rendues publiques, permettent au CIO de redistribuer plus de 90 % de ses revenus – soit 3,25 millions de dollars par jour – aux athlètes et au sport à travers le monde.
Les récentes discussions sur ces questions montrent le rôle important que joue le sport dans notre société. Le sport a le pouvoir de faire de notre monde un monde meilleur. Si ces mesures de bonne gouvernance sont adoptées et que des politiques de tolérance zéro sont mises en place par toutes les organisations sportives, l’avenir du sport sera radieux.
Ainsi que l’a dit Nelson Mandela : « Le sport a le pouvoir de changer le monde. » Oui, le sport traverse des moments difficiles. Mais ces moments nous offrent aussi l’occasion de restaurer la confiance dans la capacité du sport à changer le monde pour le meilleur.
Thomas Bach