D’après une étude du Pew Forum, 92 % des Américains croient en Dieu, mais ils ne sont que 30 % à penser que seule leur religion mène à la vérité.
La religiosité en Amérique est souvent une source de perplexité dans le reste du monde. Dans la plus vaste étude menée à ce jour sur le sujet, le Pew Forum on Religion and Public Life l’éclaire d’une lumière nouvelle, confirmant certains clichés pour en contredire d’autres.
Le Pew Forum a interviewé plus de 35 000 personnes entre mai et août 2007 pour donner un tableau complet et nuancé du paysage religieux aux États-Unis. Premier enseignement : les Américains sont universellement croyants, mais leurs pratiques religieuses sont très diversifiées.
Plus de neuf sur dix (92 %) croient en Dieu (71 % sans le moindre doute), y compris une bonne moitié des agnostiques déclarés et même un cinquième des areligieux (par «ignorance doctrinale» selon les auteurs du rapport). Pour 60 % de la population, Dieu est «une personne avec laquelle on peut avoir une relation», alors que 25 % le voient comme une «force immatérielle». S’ils ne sont que 39 % à assister à un service religieux chaque semaine (54 % y vont une ou deux fois par mois), 58 % prient chaque jour et 56 % déclarent que la religion est «très importante» dans leur vie.
Cette présence se traduit par un mysticisme très répandu : 74 % croient à une vie après la mort, autant sont convaincus que leurs bonnes actions ici-bas seront récompensées au paradis, 79 % croient aux miracles, 68 % aux anges et aux démons, 31 % affirment que leurs prières sont régulièrement exaucées dans les faits et 34 % disent avoir assisté à des guérisons miraculeuses. Bizarrement, ils ne sont que 59 % à croire à l’enfer.
Marché très concurrentiel
Cependant, ces convictions enracinées ne débouchent pas sur l’intolérance. Même si 63 % des Américains considèrent leurs textes sacrés comme la parole divine, 70 % pensent que d’autres religions peuvent mener au salut éternel. Alors que 78 % de la population attribuent une valeur intangible aux notions de bien et de mal, seuls 29 % s’appuient sur leur dogme pour en définir le contenu (52 % citent «le bon sens»). Et un quart seulement des personnes interrogées pensent qu’il n’existe qu’une seule interprétation véridique de leur foi. «Nous croyons à tout, observe Michael Lindsay du Centre sur les religions de Rice University. Nous ne sommes pas des religieux puristes ou dogmatiques.»
Sans déterminer si le phénomène en est la cause ou l’effet, le Pew Forum met l’accent sur «le marché très concurrentiel» que constitue la pratique religieuse en Amérique. Plus d’un quart de la population adulte (28 %) a abandonné la foi de ses parents pour en choisir une autre. Si l’on prend en compte le passage d’une Église protestante à une autre (de méthodiste à pentecôtiste par exemple), le chiffre passe à 44 %. Et si les catholiques représentent toujours un quart de la population, c’est seulement grâce à l’immigration d’origine latino-américaine, car environ un tiers des Américains nés catholiques ont quitté l’Église de Rome.
Un chiffre est démenti par la réalité : alors qu’à peine 14 % des sondés citent la religion comme le socle de leurs opinions politiques, l’étude du Pew Forum démontre l’existence d’un lien manifeste. Plus les individus sont croyants et pratiquants, plus ils penchent vers le camp républicain. Les deux tiers des mormons et plus de la moitié des évangéliques se déclarent conservateurs et expriment leur opposition à l’avortement et l’homosexualité. À l’inverse, les deux tiers des juifs et des bouddhistes, comme la moitié des catholiques, se disent «libéraux». Pour John Green, l’un des auteurs du rapport, «la tentative des démocrates de séduire des électeurs républicains avec l’argument de l’économie risque d’avoir un impact limité, à cause des enjeux culturels et religieux».
» LE BILLET DE WASHINGTON
http://www.lefigaro.fr/international/
2008/06/25/01003-20080625ARTFIG00010-l
-amerique-religieuse-mystique-et-tolerante.php