Le roi est nu. Ce week-end, c’est devenu flagrant: la monarchie saoudienne est bien plus fragile qu’on ne se l’imagine.
Sa Majesté Salman a émis tard samedi soir un décret annulant toutes les coupes budgétaires annoncées en septembre dans la fonction publique, laquelle emploie deux tiers des Saoudiens actifs. La grogne était telle que des manifestations étaient prévues dans quatre villes du royaume wahhabite. La semaine dernière sur les réseaux sociaux, on a même pu voir circuler des appels à instaurer une monarchie constitutionnelle et à restaurer les pouvoirs de la police religieuse! Les forces de l’ordre ont d’ailleurs été déployées dans les rues de Ryad. On n’est jamais trop prudent…Officiellement, bien sûr, le décret est justifié par une remontée inespérée des prix du pétrole, qui s’échange à 52 dollars le baril, contre 45 dollars en moyenne l’an dernier, avec des chutes à 28 dollars. C’est cet effondrement des revenus qui avait amené le roi à édicter les premières coupes salariales de l’histoire saoudienne. La Fonction publique a en effet représenté 45% des dépenses du gouvernement en 2015. Les ministres allaient donc voir leurs mensualités réduites de 20% et tous les fonctionnaires devaient renoncer à leurs avantages et à leurs bonus, qui représentaient souvent une part substantielle des budgets familiaux.
Légitimité en cause
Or, le monarque n’a pas seulement annulé ces coupes, mais promis deux mois de salaire supplémentaires aux militaires engagés dans l’intervention au Yémen. Il a aussi renvoyé le ministre de la Fonction publique et l’a fait mettre sous enquête pour abus de pouvoir.
Bref, la légitimité de la dynastie al-Saoud était en danger. Sans droit historique (ou islamique) à régner sur la péninsule et les lieux saints de la Mecque et de Médine, la famille royale se sait tolérée tant qu’elle assure des revenus confortables à ses sujets et qu’elle maintient son alliance fondatrice avec les religieux wahhabites.
Ses fils aux commandes
Samedi soir, le monarque a aussi émis un autre décret instaurant un nouveau centre de sécurité nationale, rattaché directement à la Cour royale. Il a également nommé son fils, le prince Khalid, un pilote d’avions F-15, à la tête de l’ambassade saoudienne aux Etats-Unis. Et il a mis un autre de ses fils, le prince Abdulaziz, en charge du Ministère de l’énergie… tout en limitant l’augmentation annoncée des coûts de l’énergie, de l’eau et du carburant.
Ces nominations renforcent l’emprise de la famille sur l’appareil d’Etat, déjà géré en grande partie par un autre fils, le prince Mohammed, ministre de la Défense et deuxième dans la ligne de succession au trône.