Pour leur extorquer des aveux, l’ancienne ministre israélienne Tzipi Livni aurait eu des relations intimes avec des leaders arabes : un mensonge qui a généré des dizaines d’articles enflammés dans les médias arabes.
Tout le monde se souvient sûrement d’un étrange complot israélien qui avait fait les choux gras de la presse arabe il y a quelques années. Certains journaux affirmaient que le Mossad avait envoyé des requins dressés pour attaquer les touristes sur les plages du Sinaï. Voici ce qu’on pouvait lire dans les journaux : “Après la répétition de ce genre d’attaques, le gouverneur du Sinaï est sorti de son silence pour déclarer que les requins attaquent les touristes sur injonction des services secrets israéliens.” Selon des responsables égyptiens, les Israéliens cherchaient ainsi à nuire au secteur touristique du pays.
Avant cet épisode, les médias égyptiens avaient publié une histoire stupéfiante sur un autre “complot”. A les en croire, le Mossad avait introduit sur le marché égyptien de grandes quantités d’un chewing-gum qui avait un effet aphrodisiaque sur les femmes. Cela dans le but, toujours selon la presse locale, d’“ébranler les structures sociales et la cohésion familiale égyptienne”.
A ce propos, qu’on nous permette de signaler les études qui montrent régulièrement que les Arabes sont les champions du monde de la recherche sur Internet par le mot clé “sexe” et assimilés. C’est bien la preuve que c’est leur principale obsession. Et cela mériterait probablement des recherches de la part de spécialistes en psychologie et en sociologie. Moi, j’avoue ne pas avoir les compétences pour traiter le sujet de manière scientifique. Tout ce que je peux faire pour indiquer à quel point ce problème est ancré profondément dans les sociétés arabes, c’est rappeler le nombre d’avis religieux [fatwas]en rapport avec la sexualité qui ont été émis.
Du sexe avec des Arabes
Récemment, une autre information tout aussi invraisemblable sur un autre “complot sexuel” a circulé dans la presse arabe. Du lourd, celui-là. Bien sûr, le principal héros de l’histoire était le Mossad, mais il y avait mieux : une héroïne. Son nom ? Tzipi Livni, l’ancienne ministre des Affaires étrangères israélienne. Tout est parti du journal égyptien Al-Masri Al-Youm. Celui-ci prétendait se fonder sur un entretien de Livni avec le journal anglais The Times en 2009, entretien qui aurait ensuite été repris par le quotidien israélien Yediot Aharonot. Elle y aurait dévoilé qu’elle avait eu des relations sexuelles avec des personnalités arabes à des fins politiques. Le journal égyptien avait alors titré : “Elle a eu du sexe avec des Arabes en contrepartie de concessions politiques”.
Comme d’habitude dans les affaires de complot, et plus particulièrement de sexe, l’information fabriquée de toutes pièces par le journal égyptien a circulé comme une traînée de poudre dans l’enfer des médias arabes. Passée de journaux en sites, elle a acquis le statut d’une vérité irréfutable, au point de donner lieu à une pléthore d’articles, écrits par des “éditorialistes”, des “analystes” et des “penseurs” arabes. Par exemple, selon le journaliste vedette du site d’Elaph, Najm Abdelkarim, Tzipi Livni “pratique le sexe et elle tue au nom d’Israël”.
Un autre éditorialiste d’Elaph a affirmé que, “selon les informations de Najm Abdelkarim, la sioniste Livni est prête à livrer son corps à qui le voudra, à condition que cela serve la cause sioniste. C’est ce qu’elle a effectivement fait, sans aucune pudeur.” De même, Khaless Al-Chalabi s’est fendu d’un article intitulé : “Le cancer sioniste, une approche socio-biologique”, titre qui en dit long sur le fond de sa pensée.
En revanche, aucun de ces grands esprits n’a pris sur lui de vérifier la véracité des faits. Cela ne fait pas partie des préoccupations de la presse arabe. L’important, c’est que tout reste conforme au cadre qui alimente la mentalité arabe. Depuis, l’information sur le complot sexuel s’est répandue du Machreq au Maghreb et a nourri l’imaginaire de tous les esprits avides de ce genre d’histoires. Et voilà que le journal égyptien qui en a été à l’origine, Al-Masri Al-Youm, présente ses excuses en disant qu’il n’a pas vérifié ses sources : “Il s’est avéré que ces déclarations [de Tzipi Livni]n’ont pas été citées par The Times, ni par Yediot Aharonot, mais proviennent de sources non fiables et ont été inventées.”
Compte tenu du démenti apporté par le journal à l’origine de l’affaire, je pense qu’il serait du devoir de tous ces “éditorialistes”, “analystes” et “penseurs” de présenter à leur tour leurs excuses par écrit à leurs lecteurs arabes. Car tous ces gens qui colportent des mensonges comme si c’étaient des vérités font partie du problème dont souffrent les Arabes à notre époque, dans un monde moderne en transformation. Le temps est venu de respecter le métier de l’écriture. Le lecteur arabe est celui qui a le plus besoin au monde de connaître la vérité, sans détour et sans artifices.
Traduction par Courrier International
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