Une lutte de pouvoir au centre de la saga du sport au Koweït

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Une lutte de pouvoir entre des membres de la famille régnante et des hommes politiques au Koweït semble être en grande partie responsable de la crise du sport dans ce riche émirat du Golfe soumis à des sanctions internationales, estiment des analystes.

 

Il y a plus d’un an, des instances mondiales du sport, dont le CIO et la Fifa, ont suspendu le Koweït pour la deuxième fois depuis 2010 en raison d’interférences gouvernementales présumées, après la promulgation en 2014 et 2015 de lois autorisant le gouvernement à s’ingérer dans les fédérations locales.
En conséquence, l’émirat a été empêché de participer aux Jeux olympiques de 2016 à Rio et aux qualifications du Mondial-2018 de football. Le Koweïtien Fehaid al-Deehani, qui a remporté la médaille d’or au tir double trap aux JO-2016, a participé comme indépendant en raison de la suspension de son pays.
Mais cela pourrait changer après que le nouveau Parlement – où l’opposition détient près de la moitié des sièges – a appelé le gouvernement à « faire le nécessaire pour lever la suspension dans le sport ».
Signe d’un possible progrès, le ministre de l’Information et de la Jeunesse, cheikh Salman Humoud Al-Sabah, a déclaré la semaine dernière au Parlement que le gouvernement était prêt à rencontrer « la Fifa ou toute autre partie à condition de ne pas violer la souveraineté ou la Constitution du Koweït ».
Dimanche, 11 députés de l’opposition ont demandé la tenue d’une réunion extraordinaire du Parlement pour débattre d’un projet de loi abrogeant les législations controversées jugées contraires aux chartes internationales.
Fonds publics
Deux groupes rivaux semblent être au c?ur de la crise dans cet émirat de 4,4 millions d’habitants, dont près du tiers sont des autochtones.
D’un côté, on trouve cheikh Ahmed al-Fahd Al-Sabah, l’une des personnalités les plus influentes du monde sportif, son frère cadet Tala, d’autres frères et leurs partisans, qui contrôlent la plupart des clubs et fédérations dans l’émirat.
De l’autre, on trouve le gouvernement, d’autres membres de la famille régnante des Al-Sabah et le président du Parlement Marzouk al-Ghanem, issu d’une riche famille commerçante.
Un groupe neutre a émergé au sein du nouveau Parlement et appelle à une levée de la suspension.
« Le problème du sport au Koweït, c’est qu’il est utilisé comme un moyen dans la lutte de pouvoir », explique à l’AFP l’analyste politique Nasser al-Abdali, président de l’Association koweïtienne pour la promotion de la démocratie. « Des clans au sein de la famille régnante utilisent le sport dans leurs disputes internes. »
Selon M. Abdali, d’énormes fonds publics investis dans le sport pourraient aussi avoir participé à la crise.
L’Autorité du sport avait précisé l’an dernier que le gouvernement avait dépensé en cinq ans quelque 400 millions de dinars (1,25 milliard d’euros) dans le sport.
Conflits de famille
Cheikh Salman a directement accusé « des Koweïtiens dans le sport international » d’avoir causé la suspension par des plaintes adressées aux instances internationales.
Des membres du Parlement progouvernemental, dissous en octobre, ont nommément accusé cheikh Ahmed et ses frères d’avoir provoqué la suspension. Ces derniers ont systématiquement rejeté ces accusations.
Le dernier Parlement a voté en juin une loi qui a renforcé l’influence du gouvernement dans le sport et qui lui a permis de dissoudre le Comité olympique national, la Fédération de football et plusieurs autres fédérations dirigées par cheikh Talal.
« Le problème, c’est que certains (ex-)députés et le gouvernement ont adopté une loi destinée à éloigner cheikh Ahmed et ses frères du sport local », souligne le journaliste sportif koweïtien, Fayçal al-Qanai.
« Ces lois violent les chartes sportives internationales », ajoute M. Qanai, vice-président de l’International Press Sports Association.
Cheikh Ahmed, 53 ans, détient des positions de haut niveau dans le sport mondial: il est membre du Comité exécutif du CIO et du Conseil de la Fifa.
Il est l’un des membres de la famille régnante qui peuvent prétendre un jour à l’accession au trône. Neveu de l’actuel émir, cheikh Ahmed a occupé plusieurs postes ministériels entre 2001 et 2011, date de son départ du gouvernement.
La presse locale avait rapporté que son départ était le résultat d’une lutte de pouvoir avec le Premier ministre de l’époque cheikh Nasser Mohammad al-Ahmad Al-Sabah, un cousin de cheikh Fahad, qui avait démissionné cinq mois plus tard.
« L’objectif principal était d’éloigner cheikh Ahmed du gouvernement et du pouvoir car il est influent et très compétent », relève M. Qanai, proche de la famille de cheikh Ahmed.

  AFP

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