Riyad ne voudrait pas de Aoun à la présidence

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La 45e séance électorale visant à doter l’État d’un président de la République a, sans surprise, fait chou blanc, contrairement aux rumeurs alimentées par certaines parties du 8 Mars selon lesquelles cette séance devait être déterminante pour l’avènement du chef du bloc du Changement et de la Réforme, le député Michel Aoun, à la magistrature suprême. Une fois encore, les boycotteurs ont donc récidivé, et ce sont les mêmes qui ont fait acte de présence.

Avant la séance, des informations avaient filtré concernant la position de l’Arabie saoudite, toujours hostile à l’arrivée de Michel Aoun à Baabda. Le ministre Waël Bou Faour, dépêché à Riyad par le chef du Rassemblement démocratique, le député Walid Joumblatt, pour sonder les intentions saoudiennes à ce sujet, en aurait déduit que, pour le royaume wahhabite, le temps n’est pas aux compromis et aux concessions. M. Bou Faour aurait été témoin d’un discours particulièrement virulent à l’égard de l’Iran et de ses agissements dans la région, ce qu’il aurait interprété comme un message négatif concernant tout soutien éventuel à la candidature Aoun. Un message qu’il a transmis aux présidents de la Chambre, Nabih Berry, et du Conseil, Tammam Salam, ainsi qu’à M. Joumblatt.

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Du côté du 8 Mars, Saad Hariri est la cible désignée d’une attaque qui consiste à dire que c’est le courant du Futur et avec lui l’Arabie saoudite qui assument la responsabilité du blocage présidentiel. Une déformation des faits, s’indignent les milieux proches de la formation haririenne, en rappelant que ce sont les députés du 8 Mars qui boycottent les séances sans relâche depuis plus de deux ans et demi, alors que le 14 Mars a déjà fait une multitude de propositions et de concessions pour sortir de l’impasse… sans que le Hezbollah ne change pour autant sa position de blocage d’un iota. Le parti chiite continue d’exprimer son attachement verbal à la candidature Aoun, sans rien faire dans la pratique pour assurer son élection, notamment au niveau de ses alliés, comme Nabih Berry par exemple.

Des sources parlementaires proches du courant du Futur renvoient ces accusations à leurs auteurs : qu’a donc fait Téhéran pour faciliter l’élection ? Les responsables iraniens se contentent de répéter aux dirigeants et émissaires internationaux qu’ils ne s’ingèrent pas dans les affaires libanaises, en les invitant à aller discuter plutôt avec le Hezbollah. Tout indique, disent-ils, que c’est l’Iran qui bloque l’échéance, avec l’aide des composantes libanaises qui lui sont acquises, en dépit du fait que les deux candidats en lice soient des pôles du 8 Mars. De l’aveu d’un leader du Nord membre des forces du 8 Mars, le temps n’est pas encore venu d’affranchir la présidentielle. Aucune décision régionale ou internationale n’existerait dans ce sens, dit-il, en précisant que le 8 Mars avait été informé, avant la fin du mandat Sleiman, qu’il n’y aurait pas d’élection, le dossier étant lié aux affaires régionales et à la lutte d’influences en cours actuellement.

(Lire aussi : Hariri à Saïfi, « sans initiative politique de déblocage »)

Après la signature de l’accord sur le nucléaire iranien, Téhéran aurait tenté, selon des sources diplomatiques, d’initier des négociations sur les dossiers régionaux avec les États-Unis, ainsi que sur son rôle dans le règlement des contentieux, mais sans succès. Les alliés de Washington dans la région ont aussitôt opposé leur veto à tout partenariat avec l’Iran. Depuis, Téhéran conserve jalousement la carte libanaise comme l’une de ses cartes maîtresses afin de renforcer sa position lors de négociations à venir avec les parties régionales, internationales et mêmes libanaises. Pour Washington, il serait exclu de négocier avec l’Iran sur l’échéance présidentielle libanaise. L’administration Obama, qui encourage un accord interlibanais, refuserait cependant que ce dernier ait lieu sous la contrainte.

La surprise de la 45e séance électorale a sans conteste été, hier, la participation du député Estephan Doueihy, du bloc Frangié, qui a rappelé que le leader des Marada reste en lice, dans la mesure où « il possède des critères qui font de lui celui qui est le plus à même de réaliser un consensus national » autour de sa personne. M. Doueihy a également rejeté toute modification de l’image et de l’identité du Liban, appelant à dépasser les ego et à songer à l’intérêt national. Ces propos ont été accompagnés du tweet de Sleiman Frangié hostile à l’égard du général Aoun. Le leader des Marada aurait décidé d’ouvrir le feu sur son rival, de changer de ton à l’égard de ses alliés et d’adresser des messages en direction du Hezbollah. Reste à savoir si ce dernier, ainsi que son mentor iranien, ont enfin décidé de changer de posture et de délivrer la présidence de ses chaînes.

L’Orient Le Jour

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