La table de dialogue, un mal incontournable ?

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« Les discussions qui ont eu lieu à la table de dialogue ont clairement démontré que l’une des composantes essentielles du camp du 8 Mars œuvre assurément à obstruer l’élection présidentielle ». C’est ce que constate l’un des participants à cette réunion qui évoque notamment l’insistance du CPL, représenté par son chef, Gebran Bassil, sur l’élection du président au suffrage universel, arguant en faveur d’une représentation qui puisse refléter la volonté du peuple sans interférence étrangère. Une proposition qui a été rejetée par la majorité des participants, y compris les alliés de Michel Aoun, le Hezbollah ayant toutefois maintenu son soutien à la candidature du chef du bloc du Changement et de la Réforme.
Aux propos de l’ancien chef du gouvernement, Fouad Siniora, qui a clairement fait savoir que le courant du Futur ne saurait accepter l’élection de M. Aoun, Gebran Bassil a répondu : « Il semblerait que notre présence mette dans l’embarras certains. Il serait donc préférable que nous ne fassions plus acte de présence. » Une réaction qui a vite été rejetée par le président du Parlement qui a insisté sur l’importance de poursuivre le dialogue autour des questions conflictuelles.
Nabih Berry a ainsi invité les différents protagonistes à mettre par écrit leurs suggestions sur l’élection présidentielle afin qu’elles soient ensuite soumises à discussion de sorte à ne pas continuer de tourner en rond. Certains participants ont considéré les propos de M. Bassil comme étant une menace qui ne saurait être exercée de la sorte sur la table de dialogue. Des sources proches de Rabieh ont affirmé que le CPL ne fera pas acte de présence à la prochaine réunion s’il constate un manque de sérieux dans les discussions. L’un des participants à cette table a d’ailleurs estimé que le dossier de la présidentielle a dévoilé au grand jour la position de certains. Ainsi, et en dépit du refus des représentants du 14 Mars, rejoints par M. Berry, Walid Joumblatt et d’autres, d’avaliser la proposition d’amendement de la Constitution pour l’élection du président au suffrage universel, le Hezbollah, soutenu par le CPL, a insisté sur la nécessité de convenir du nom du candidat avant la séance du vote. Certains participants ont invité les députés à se diriger au Parlement et à ne plus quitter les lieux avant d’élire un chef d’État.
La question est aujourd’hui de savoir quel sera le sort de la table de dialogue après le boycottage des FL de cette assemblée et la sérieuse remise en cause de la participation aouniste.
Un ministre informé assure à ce propos que toutes les parties en présence, y compris le Hezbollah, ont intérêt à préserver le dialogue, corollaire de la stabilité qui reste indispensable pour éviter l’effondrement de l’État.
Le Hezbollah et ses alliés, qui ont tous exprimé leur attachement à Taëf en reniant tout souhait en faveur d’une Constituante, ont accusé le 14 Mars de ne pas appliquer la Constitution et de passer outre son esprit et son texte et de l’appliquer de manière sélective. Certains milieux du 8 Mars ont indiqué que le Hezbollah a conseillé à M. Aoun de ne pas boycotter la table de dialogue, soulignant que le parti pourrait continuer de faire pression en ce sens pour s’assurer de la poursuite du processus.
Certains craignent d’ailleurs les effets d’un éventuel boycottage de cette assemblée dans un contexte d’agitation sociale qui a commencé à prendre une orientation violente. L’insurrection se serait ainsi transformée en une confrontation avec les forces de l’ordre sans aucune feuille de route en main, les protestataires se contentant de slogans tournant autour du changement.
Des sources sécuritaires ont estimé que le mouvement de protestation actuel a dévié de ses objectifs, les manifestants s’étant transformés en groupes qui s’en prennent désormais à la sécurité. De telles craintes sont également exprimées par des observateurs qui mettent en garde contre le retour au chaos qui serait accompagné d’un effondrement de l’État.
D’une même voix, dans les milieux des forces du 8 et du 14 Mars, on affirme que les protestataires cherchent à entraîner le Liban dans le « chaos constructif », terme employé par Walid Joumblatt qui s’est dit inquiet de ce qui se passe dans la rue.
Dégoûté par la situation à laquelle est parvenu le pays, le Premier ministre, Tammam Salam, affirme ne pas vouloir se poser en faux témoin, surtout après avoir assisté aux transactions menées au sein du Conseil des ministres autour des quotes-parts sur les nominations et à la prévalence de certains intérêts personnels et privés.
Le chef du gouvernement tient à rappeler une fois de plus qu’il est à égale distance de toutes les parties en présence, et crie haut et fort son indépendance assurant qu’aucune partie ne saurait l’entraîner dans les méandres de la polarisation. Justifiant son refus de démissionner par le soutien inconditionnel que lui fournit le chef du législatif ainsi qu’au gouvernement, M. Salam a fait état en outre des nombreux contacts qu’il a reçus de responsables arabes et étrangers qui l’ont sommé de ne pas rendre le tablier et de continuer à assumer ses responsabilités. Selon lui, le premier pas vers la solution est sans aucun doute l’élection d’un chef de l’État.
Côté occidental, on estime que la période actuelle est un temps mort, les solutions et les compromis étant actuellement en gestation. Le mot d’ordre est par conséquent à la préservation de la stabilité en attendant la maturation d’un règlement. Selon un député du Rassemblement consultatif, un compromis autour du nœud des nominations serait sur le point d’aboutir. Les visiteurs du Premier ministre assurent quant à eux que de nouvelles positions sont à attendre de M. Salam dès son retour de New York, notamment pour ce qui est de la redynamisation du Conseil des ministres qu’il n’acceptera plus de voir paralysé.

L’Orient Le Jour

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